Lors de la synthèse d’une « co-formation par le croisement des savoirs et des pratiques » [1] à l’École nationale de la magistrature entre des juges et des militants Quart Monde, Maria, une militante, a dit : « Je vais maintenant témoigner dans mon milieu qu’on peut parler avec des juges. »
Pourtant, un tel résultat n’allait pas de soi.
Les juges et les militants ayant l’expérience de la pauvreté ont passé quatre journées ensemble afin de se former mutuellement, de découvrir les stéréotypes qu’ils ont les uns sur les autres et de confronter leurs conceptions de la justice. Au bout de deux jours, les militants avaient l’impression que les juges ne les croyaient pas.
Mais, lors de la synthèse finale, des propositions à deux voix ont été faites sur deux sujets essentiels : la présence de personnes tiers assistant les familles face au juge et l’accès des familles au dossier les concernant. Magistrats et militants ont exprimé les mêmes solutions pour que les familles et le juge puissent mieux se comprendre. Et l’on sentait qu’en pensant ensemble, ils avaient acquis une reconnaissance réciproque !
Paul Bouchet, avocat des droits de l’Homme depuis 1940 et ancien président d’ATD Quart Monde, a assisté à cette synthèse. Il a dit son combat et son espoir pour que la justice entende le cri des pauvres et qu’elle prenne en compte le malaise de ceux avec qui, le plus souvent, elle ne dialogue pas d’égal à égal, comme avec les autres citoyens.
Lorsque des personnes qui connaissent la grande pauvreté et des professionnels font ce travail de croiser leurs savoirs afin d’avancer ensemble, l’espoir s’ouvre d’une société où la misère sera éradiquée.
Pierre-Yves Madignier, Président du Mouvement ATD Quart Monde en France
[1] Voir www.croisementdessavoirs.org