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Trois livres à dévorer

Le récit étonnant de deux épreuves surmontées : le chômage et l’exclusion pour Charles Mérigot, ancien responsable informatique d’un hôpital, et une tumeur au cerveau pour Colette Utzmann, enseignante en retraite. Pour eux, la cymbalaire (petite plante vivace qui grimpe sur les murs) a refleuri. Ils ont décrit au jour le jour comment leur vie a changé, avant, pendant, après. Leur récit simple et précis touche le lecteur droit au coeur.
Et un troisième ouvrage rempli d’analyses et d’exemples éclairants montre combien les inégalités nuisent aux sociétés et à chacun d’entre nous… qu’il soit riche ou pauvre.

Le dit de la cymbalaire. Du chômage et autres poisons
Charles Mérigot
Éditions La Ramonda1, 2005 et 2013, 242 pages.
Extrait
« Quand vous travaillez en contrat à durée déterminée, le comptable calcule votre salaire vers le 18 du mois, lance l’ordre de virement vers le 23, ou le 30 dans le pire des cas. Il suppose que si vous tombez malade ou si vous quittez votre emploi, il trouvera un moyen de vous reprendre le trop-perçu. En bref, il vous fait confiance.
Pour un chômeur, c’est différent. Ses indemnités ne seront calculées qu’une fois le mois totalement écoulé. On ne sait jamais, il pourrait retrouver du travail le 28 ou le 30. Quelques jours sont nécessaires pour les calculs, donner l’ordre de virement et faire le transfert vers les banques. L’argent à l’époque n’arrivait que vers le 12 du mois suivant.
Mes prélèvements automatiques sont arrivés le 5. Je n’ai pas su adapter assez rapidement mes dépenses. Comme si cela ne suffisait pas, l’ASSEDIC compte, le premier mois, six jours de carence. Est-ce pour être bien sûre de déséquilibrer mon budget dès le début ? J’ai acquitté des agios. Quant au loyer que je devais payer le 1er, j’ai attendu le mois suivant pour le régler.
Lorsqu’une lettre de rappel est arrivée le matin et que je me demande comment régler le loyer, j’éprouve des difficultés à rédiger une lettre de motivation pour une demande d’emploi. Difficile d’écrire : « J’ai toujours su faire face aux difficultés dans mon travail » quand on vient d’écrire : « J’ai les plus grandes difficultés à vous payer. » »

Trou blanc
Colette Utzmann
Éditions Reber, 2013, 144 pages.
Pour commander le livre : Éditions Reber, 5a Avenue Méquillet – 68340 Riquewihr (18€+3€ de port) contact : jd.reber@free.fr
Extrait
« Lorsqu’il m’a téléphoné à l’hôpital, Jean-Michel2 a bien fait de souffler dans mon oreille : « Il faut que tu écrives ». Sur le moment, je me suis dit : « Le pauvre, il ne réalise pas dans quel état je me trouve ! ». Comme tout s’est étonnamment bien passé pour moi, je n’aurais peut-être pas eu l’idée d’écrire et cette maladie aurait eu le même impact dans ma vie qu’un gros rhume, peut-être une bronchite bien soignée et qu’on oublie. Écrire a été un autre combat qui a supplanté la maladie. Le début de ce combat est daté : il a commencé, il y a très longtemps, lorsque j’ai débuté à la bibliothèque de rue3. Patricia4 insistait  à chaque réunion  : « Il faudrait écrire après chaque séance. C’est important ». Je ne voyais pas pourquoi c’était important, mais je me glissais dans ce fonctionnement préconisé. J’étais en plein déni de tout ce qui de près ou de loin concernait le bénévolat, les bonnes actions, la religion. Je suis juste venue voir, je ne voulais pas faire de vagues dès mon arrivée. J’ai donc écrit sans trop réfléchir : laisser venir les choses. Au bout de quelques semaines, je relis les pages noircies du cahier d’écolier que j’utilisais, je suis surprise de voir émerger Françoise, une jeune adolescente à ce moment-là, celle qui est venue me voir à l’hôpital. Elle ne venait pas souvent lire des livres. Le samedi, elle aidait sa maman à faire le ménage et gardait ses petits frères et sœurs. Les moments captés, au fil du temps, esquissaient une personnalité pétrie de courage, de générosité et tout en n’étant qu’une enfant, elle avait un très grand sens des responsabilités. Par l’écriture, Françoise a commencé à exister dans ma vie et n’a jamais cessé de me fasciner, encore aujourd’hui, les rares fois où je peux la voir. Je découvrais ce qu’était une rencontre, une de celles qui vous modifient, qui marquent son empreinte en vous. »

Pourquoi l’égalité est meilleure pour tous
Richard Wilkinson et Kate Pickett
Éditions Les petits matins, Institut Veblen et Étopia, 2013, 512 pages.
On savait déjà que la poursuite de la croissance économique s’accompagnait de risques écologiques majeurs. Ce livre passionnant et accessible démontre en plus qu’à partir d’un certain niveau de richesse collective que nos sociétés développées ont déjà atteint, la croissance apporte beaucoup moins de bienfaits. Pire, les inégalités qui l’accompagnent le plus souvent engendrent au contraire mal être, insécurités et violences, méfiance entre les personnes, échec scolaire, destructions de l’environnement, elles réduisent l’espérance de vie, etc., et ce, pour toutes les couches sociales. Conclusion des auteurs : « Ce n’est pas la richesse qui fait le bonheur des sociétés, mais l’égalité des conditions. »
Quant à savoir comment réduire ces inégalités, le livre ne tranche pas : réduction des écarts de revenus comme au Japon, fiscalité et redistribution comme dans les pays scandinaves…
Ce qui est sûr est que cela est possible. Et tout ce que les pays y gagnent saute aux yeux.