Une trentaine de militants et militantes Quart Monde de sept pays ont réfléchi pendant trois ans avec des volontaires permanents, des professionnels, des universitaires et des décideurs à la manière de « rompre la transmission de la pauvreté ». Deux d’entre elles et une alliée décrivent la manière dont elles ont travaillé pour parvenir à des propositions concrètes.
Gaëlle Le Dins et Magalie Dethan ont toutes deux été confrontées aux services de la protection de l’enfance. Elles ne s’imaginaient pas que leurs situations pouvaient faire écho à de nombreuses familles en Europe. Toutes deux ont choisi de s’engager dans la démarche du Chantier familles, car “un combat collectif, c’est mieux qu’un combat personnel. Les voix portent plus”, explique Gaëlle Le Dins. Même si elles se battent pour cela, l’une comme l’autre ont conscience que ce travail mené pendant trois ans ne leur permettra pas forcément de vivre à nouveau avec leurs enfants qui ont été placés. Mais elles savent que cela pourrait être utile à d’autres.
“Moi, j’ai des gens qui m’épaulent. Certains parents n’ont personne, ils ne savent pas quoi faire et ont souvent l’impression que tout ce qu’ils vont dire aux services sociaux va leur porter préjudice. Le fait de dire que, même si on a des difficultés, on est des parents comme les autres, peut aider certaines familles”, précise-t-elle. “Personnellement, cela me permet de ne pas baisser les bras, d’aller de l’avant, de ne pas trop penser à ma situation personnelle. Nous sommes des porte-parole”, affirme Magalie Dethan.
S’unir pour faire respecter les droits humains
Pour porter encore plus haut cette parole, les deux militantes Quart Monde estiment que la présence d’alliés autour d’elles est nécessaire. “Le duo militants-alliés est indispensable. Les premiers apportent toute leur expérience. Les seconds viennent avec leur connaissance des institutions, ils sont des passerelles. Toutes et tous réfléchissent ensemble à la façon de présenter les propositions, afin qu’elles soient entendables par les professionnels”, confirme Mariette Legendre, alliée. Ils peuvent également “ouvrir des portes”, poursuit Magalie Dethan. À Brest, par exemple, les participants au Chantier familles ont notamment pu rencontrer la Bâtonnière et le vice-président du conseil départemental afin de leur présenter leurs propositions.
“Des choses simples peuvent se mettre en place : le droit pour les familles d’être accompagnées lorsqu’elles rencontrent le juge n’est inscrit nulle part sur les convocations. Il suffit d’ajouter une phrase pour que les parents sachent au moins qu’ils ont cette possibilité-là. Nous espérons que cela sera fait rapidement”, détaille Gaëlle le Dins. “Les militantes me donnent une énergie dans le combat. C’est cette construction commune entre militants, alliés et professionnels qui fait toute l’originalité d’ATD Quart Monde”, conclut Mariette Legendre, qui rappelle la phrase du fondateur du Mouvement, Joseph Wresinski, selon laquelle “s’unir pour faire respecter les droits de l’Homme est un devoir sacré”.
Cet article est extrait du Journal d’ATD Quart Monde de juillet-août 2024.
Photo : Les participants au Chantier familles le 20 novembre 2023 à Pierrelaye. © Carmen Martos.