Daniel Le Guillou, président de l’EBE Actypoles-Thiers et administrateur de l’association Territoires zéro chômeur de longue durée, salue l’adoption définitive de la loi ce 30 novembre, mais estime que “le chemin à parcourir n’est pas achevé”.
L’expérimentation qui a débuté en janvier 2017 est déjà riche d’enseignements. Le résultat le plus important est que près de 1000 personnes sont sorties de la privation d’emploi et ont été embauchées par 13 Entreprises à But d’Emploi (EBE), soit 80 salariés en moyenne par EBE et cela en moins de quatre ans.
Cela étant, le chemin à parcourir n’est pas achevé puisqu’il reste sans doute autant de personnes à embaucher pour que le droit à l’emploi soit effectif pour toutes les personnes concernées et notamment pour celles qui étaient les plus éloignées de l’emploi. Au moment où les parlementaires viennent de voter l’extension de l’expérimentation, garantir ce fil rouge du projet est essentiel et suppose, au minimum, que deux conditions soient satisfaites.
En premier lieu, il est essentiel que le comité local pour l’emploi (CLE) ait l’objectif et les moyens de continuer inlassablement à faire vivre ce droit, notamment pour les personnes qui ne sont pas identifiées par Pôle emploi (environ 20% à Thiers). La loi qui vient d’être votée confirme la notion de privation d’emploi, et c’est une belle avancée législative à mettre au crédit de tous les acteurs du projet qui se sont mobilisés. En revanche, elle ne prévoit pas le financement du CLE qui demeure un îlot de précarité au sein du projet. Il est impératif que le décret d’application de la loi, en cours d’élaboration, permette au Fonds d’expérimentation de le financer.
Un défi permanent
Mais le droit à l’emploi ne s’arrête pas à la porte de l’EBE. En effet, l’expérimentation en cours montre que le maintien dans l’emploi, pour certains salariés, souvent ceux qui en étaient les plus éloignés, est un défi permanent. Or, la réussite du projet n’a de sens qu’avec eux. L’emploi, l’EBE, n’effacent pas toutes les difficultés de la vie. L’accompagnement individuel dont ils ont besoin a un coût qui, additionné au coût des autres objectifs de cette politique sans équivalent (absence de sélection, non-concurrence des activités), montre clairement que le montant actuel de l’allocation de l’État (17 500 € par salarié à temps plein) est nettement insuffisant.
Là encore, et c’est la deuxième condition de réussite du projet, il est impératif que le décret prenne en compte cet enseignement de l’expérimentation car, comme l’a déclaré la rapporteure de la loi, dans ce projet, “l’indicateur financier ne doit pas être prioritaire”.
Cet article est extrait du Journal d’ATD Quart Monde de décembre 2020.