Lauréate du Programme national d’insertion par les compétences piloté par le ministère du Travail, l’expérimentation OSEE a le soutien de la Caisse des dépôts et consignations. La pédagogie est mise en œuvre par le Greta MTE 93 et évaluée par la Fabrique des territoires innovants.
“Ce projet repose sur un pari : investir dans la formation d’adultes en manque de qualification peut vraiment bénéficier à toute la société. Aujourd’hui, ces personnes ne peuvent accéder seules à une formation qualifiante de leur choix, parce que les dispositifs ne sont pas adaptés. C’est donc un vrai défi pour nos institutions”, affirmait Isabelle Bouyer, déléguée nationale d’ATD Quart Monde, en mai dernier. Pour relever ce défi, plusieurs partenaires ont rejoint le projet, afin d’accompagner les stagiaires au cours de cette année de pré-qualification.
Une convention a ainsi été signée avec le Greta MTE 93, établissement public de formation continue des adultes de Seine-Saint-Denis. Pour Gabriel Kourchid, conseiller en formation continue au rectorat de l’académie de Paris, OSEE représente réellement “un vrai défi technique”. Le projet avait en effet été initialement amorcé avec un autre partenaire et le Greta ne l’a rejoint qu’au cours de l’été. “En quelques semaines, nous avons dû nous approprier la logique de l’expérimentation, concevoir la formation, trouver les formateurs…”, souligne Laurence André, conseillère en formation continue au sein du Greta MTE 93.
Diversité des parcours
La spécificité d’OSEE réside aussi dans “la co-construction avec ATD Quart Monde et la nécessité de faire se croiser deux types d’expertise qui se rencontrent peu en temps normal : l’accompagnement associatif, individuel, de personnes en situation d’exclusion et la mise en place de dispositifs de formation de groupes, selon des cahiers des charges extrêmement ficelés par les commanditaires institutionnels, État, régions…”, explique Gabriel Kourchid.
Le Greta MTE 93 doit en outre s’adresser ici à un public en situation d’exclusion, parfois proche de l’illettrisme, “qu’il ne voit pratiquement jamais, en raison de problématiques d’éloignement géographique par rapport aux centres de formation, mais aussi car ces personnes ont souvent trouvé un équilibre, grâce à beaucoup d’astuces quotidiennes, des échanges de compétences, des solidarités locales. Il y a aussi parfois un réflexe d’évitement. Pour ne pas se mettre à l’épreuve de l’absence de certaines compétences, on trouve des solutions alternatives, souvent plus coûteuses en temps, on se ferme des portes”, précise-t-il.
Une ambition extraordinaire
Autre partenaire fortement impliqué : la Fabrique des territoires innovants, société coopérative qui accompagne les projets collaboratifs. Elle doit mener l’évaluation du projet. “L’ambition d’OSEE est extraordinaire, tout comme le profil des stagiaires. Ils n’ont jamais la reconnaissance du contrat de travail, même si leur activité correspond à beaucoup de postes existants. C’est un projet de transformation sociale face à des institutions qui ne veulent pas forcément se transformer, qui sont dans des espaces très catégorisants et perdent souvent les profils les plus atypiques”, explique Anne Jacquelin, directrice Recherche et développement.
L’objectif, pour Anne Jacquelin, est d’aboutir à “un changement systémique, car aujourd’hui, si on n’a pas le Compte personnel de formation correspondant ou le réseau nécessaire, cela ne marche pas. Si on a toutes les compétences pour exercer un emploi, mais que l’accès à la formation nécessite la rédaction d’un rapport, cela ne fonctionne pas. Il est nécessaire de faire évoluer cet écosystème très clos”.
Les membres du projet vont également mener un travail avec les écoles adhérentes à l’Unaforis (Union nationale des acteurs de formation et de recherche en intervention sociale), afin de faire des ponts entre OSEE et la formation qualifiante et de permettre, à plus long terme, la généralisation du dispositif.
Cet article est extrait du Journal d’ATD Quart Monde de février 2021.