Six communes de la communauté urbaine du Grand Poitiers sont candidates à l’expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée et espèrent ouvrir une Entreprise à but d’emploi en janvier 2022.
“C’est une nouvelle pierre que nous avons posée”, se réjouit Patricia Taschet à la fin de la première réunion du Comité local pour l’emploi, le 3 mars dernier. Elle est l’une des porte-parole des personnes privées d’emploi mobilisées depuis 2017 pour développer un Territoire zéro chômeur de longue durée sur la communauté urbaine du Grand Poitiers.
Six communes sont engagées dans ce projet porté très fortement par les centres socioculturels de trois quartiers populaires de Poitiers, Les 3 Cités, Bellejouane et Bel-Air. Réunissant une soixantaine de participants, ce Comité local pour l’emploi a pour objectif de “construire un dossier de candidature le plus épais possible, avec tous les partenaires” pour faire partie des 50 nouveaux territoires de l’expérimentation prévus par la loi du 14 décembre 2020, explique Gwenaël Caillaud, directeur du centre social de la Blaiserie. Avant le mois de juillet, il reste encore à définir précisément les activités non-concurrentielles que pourrait assurer l’Entreprise à but d’emploi, trouver les locaux de l’entreprise, affiner le budget…
“La démarche s’appuie sur trois fondamentaux : personne n’est inemployable ; ce n’est pas le travail qui manque ; ce n’est pas l’argent qui manque”, rappelle Michel François, président du Comité local pour l’emploi et maire de Dissay. “On remet des personnes debout, on leur donne des perspectives. On fait en sorte que notre territoire se reconstruise socialement et économiquement d’une manière un petit peu différente. C’est pour des projets comme celui-là que je me suis investi dans la chose publique”, souligne-t-il.
Fierté partagée
L’enthousiasme est le même pour Benoît Flavigny, allié d’ATD Quart Monde. “C’est une fierté partagée. Nous sommes tous très heureux de porter ce projet ensemble. C’est peut-être le premier projet qui ne fait pas d’écrémage, qui ne va laisser passer personne entre les mailles du filet. Un des enjeux extraordinaires de ce projet est de permettre à toutes les personnes volontaires d’accéder à l’emploi. Il faudra les soutenir et les encourager pour qu’elles puissent aller au bout de leur démarche”, précise-t-il.
Et l’emploi du temps des personnes privées d’emploi mobilisées montre qu’elles “s’investissent à fond”, comme le souligne David Pierson, l’un des porte-parole. “Nous nous engageons dans ce projet pour trouver un emploi, revendiquer le droit à l’emploi pour tous, y compris les personnes handicapées à mobilité réduite, éradiquer la misère, sortir de la précarité, penser aux générations futures pour éviter qu’elles se retrouvent dans la même situation que nous et retrouver notre dignité et notre fierté”, détaille Patricia Taschet.
Effet de sidération
En plus des réunions et des assemblées générales, les participants ont commencé le 14 janvier un “porte-à-porte pour l’emploi”, pour faire connaître le projet. Ils ont déjà frappé à plus de 1 000 portes et ont rencontré plus de 300 personnes intéressées. “Il y a un effet de surprise, voire de sidération quand on explique qu’on va créer des emplois adaptés à chacun”, constate Dominique Rudnik, directeur du centre d’animation Cap Sud.
“Si on réussit ce pari de créer une entreprise et de l’ouvrir en janvier 2022, on commencera une nouvelle vie. On pourra prouver aux personnes qui ne croient pas en nous qu’on a su se débrouiller sans elles, qu’on en est capable. Et peut-être que les personnes qui sont dans la même situation que nous, dans une misère pas possible, viendront nous rejoindre et sortiront de la galère. Ce serait génial”, conclut Emmanuelle Boireau, l’une des porte-parole des personnes privées d’emploi.
Cet article est extrait du Journal d’ATD Quart Monde d’avril 2021.
Photo : Porte-à porte pour l’emploi dans le quartier de Bel-Air à Poitiers. © TZCLD