La chronique de Bella Lehmann-Berdugo
16 ans
Philippe Lioret. Fiction. France. 4 janvier
Nora et Léo se rencontrent en classe. Ils deviennent amoureux. Tarek, le frère de Nora, est manutentionnaire dans le supermarché dirigé par Franck, le père de Léo. Soupçonné du vol d’une bouteille de vin, Tarek, coupable idéal, est renvoyé d’un claquement de doigt. Méfiance, soupçons entre classes sociales, la machine infernale des préjugés est lancée. Les relations intra-familiales, intra-entreprise, les différences culturelles sont vues avec finesse. Les trois jeunes protagonistes évoluent avec un grand naturel. Un « Roméo et Juliette » des temps modernes.
Brillantes
Sylvie Gautier. Fiction. France. 18 janvier
Karine est employée comme femme de ménage de nuit. Elle partage sa vie entre ses collègues chaleureuses et Ziggy, son fils de 17 ans. Il l’aide pour ses papiers car elle ne sait pas lire. À l’occasion du rachat de l’entreprise, la cheffe de Karine découvre ce « handicap ». Entre scènes de groupe joyeuses et d’autres plus pesantes, la honte, l’angoisse, la solitude d’une femme sensible et intelligente sont jouées avec tact.
Alis
Clare Weiskopf, Nicolas van Hemelryck. Documentaire. Colombie. VOST. Primé à la Berlinale 2022. 25 janvier
À Bogota, un foyer où des jeunes filles sans domicile ou sans famille, qui ont toujours travaillé, bénéficient d’une pause. Face caméra chacune s’adresse à Alis, une amie imaginaire. L’émotion affleure petit à petit, parfois jusqu’au malaise pour le spectateur. Le dispositif original, proposé dans le cadre d’un atelier, les invite à projeter des expériences traumatiques, mais aussi des rêves, des désirs, jamais envisagés auparavant, ni par elles ni pour elles. Ainsi, ces princesses tête haute pourront-elles un jour reprendre du pouvoir sur elles-mêmes, sortir des préjugés environnants. « Alis existe-t- elle ? Oui ! Elle s’est enfuie dans un monde plus libre. »
Nos soleils
Carla Simon/accent grave/. Espagne. Fiction. 18 janvier. VOST (catalan). Ours d’Or à Berlin 2022.
Comme chaque année, en Catalogne, la famille Solé unit ses forces, toutes générations confondues, pour la cueillette des pêches dans l’exploitation artisanale. Ils exploitent les vergers depuis toujours. En ce temps-là, la parole d’honneur suffisait à sauvegarder les droits. Les fruits ne rapportent « que des miettes » mais essentielles pour eux. Hélas, le propriétaire veut raser les pêchers et installer des panneaux solaires. Comment s’en défendre ? Là-dessus ils sont divisés. Un hommage aux derniers agriculteurs traditionnels. Une chronique paysanne familiale avec de longues scènes de repas, de récoltes, de jeux. Et le silence de l’aïeul qui regarde changer le monde autour de lui.
Le chant des vivants
Cécile Allegra. Documentaire. France.18 janvier. Français et VOST.
Des jeunes gens venus d’Érythrée, du Soudan, de RDC, de Guinée, de Somalie, rescapés des pièges libyens pour la plupart, séjournent quelques jours à Conques, dans l’Aveyron pour y déposer leurs blessures. L’association Limbo et des habitants bénévoles leur offrent l’hospitalité. Ici leurs mots, parfois longtemps retenus, sont recueillis en prenant le temps. « Il n’y a pas de mots pour dire l’enfer en Libye, on a tué une partie de moi là-bas ». Petit à petit surgit l’idée de muer le récit de leurs vies au pays natal, de leurs chemins d’exil en chants. Paroles mises en musique grâce à un guitariste à la fois attentif et exigeant. Ces femmes, ces hommes aux visages graves s’animent petit à petit d’un sourire, d’une connivence. Aujourd’hui, elles et ils chantent aussi contre l’oubli de celles et ceux qu’ils ont connus qui n’ont pas survécu.
Divertimento
Marie-Castille Mention-Schaar. Fiction d’après une histoire vraie. France. 25 janvier
Les sœurs jumelles Ziouani ont grandi bercées de musique classique grâce un père très mélomane, émigré d’Algérie. Zahia rêve de devenir cheffe d’orchestre, Fettouma, violoncelliste professionnelle. “En banlieue on n’a pas de pognon, mais on a de l’imagination ! » De Pantin au lycée Racine à Paris, du conservatoire de Stains aux concours prestigieux, elles font face aux préjugés sexistes ou sociaux, aux moqueries, aux intimidations. Pour Zahia, la rencontre providentielle d’un maestro réputé et exigeant l’aidera. Les deux actrices principales font corps avec leur personnage. Chacune a travaillé avec la vraie cheffe et la vraie violoncelliste. Les autres acteurs sont de réels musiciens.
Zahia est littéralement habitée par la musique. Le métro, la ville, la piscine, tout est musique. La détermination, le découragement, les rivalités entre élèves, la complicité des sœurs jalonnent leur parcours exemplaire. Soucieuses de transmettre au plus grand nombre, elles relèvent un autre défi : fonder un orchestre composé de jeunes de tous milieux.
Autant le savoir : tout le film baigne dans la musique classique célèbre ou moins connue, parfois panachée de musiques d’ailleurs.
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