Dans le cadre de la Journée mondiale du refus de la misère, ATD Quart Monde organisait samedi 16 octobre une table ronde intitulée “Participation citoyenne et développement du pouvoir d’agir” à la Maison de la radio et de la musique, à Paris.
Pour la dernière Rencontre des refus de la misère avant le 17 octobre, la thématique du “pouvoir d’agir” était au centre des débats. Les intervenants ont ainsi pointé le pouvoir d’agir des personnes en situation de pauvreté, qui peut-être “le pouvoir de dire non, la capacité de résister, de se mettre avec d’autres”, pour Évelyne Dubois, militante Quart monde ; mais aussi le pouvoir d’agir des décideurs. “La pauvreté n’est pas une fatalité, c’est le résultat de choix ou de non choix politiques. Quand on veut faire des choses qui bousculent l’ordre établi, qui est celui de la prédation des richesses par quelques-uns, ça dérange”, a ainsi souligné Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France. Souhaitant “insuffler un peu de révolte”, l’ancienne ministre du Logement a souligné la nécessité d’une “redistribution des richesses”.
Un constat partagé par Bernard Thibault, ancien secrétaire général de la CGT et administrateur du Bureau international du travail, pour qui “on ne peut prétendre éradiquer la pauvreté sans agir sur la réduction des inégalités de revenus”. Constatant l’augmentation du nombre de “travailleurs pauvres”, il a notamment rappelé qu’aujourd’hui, dans le monde, “six emplois sur dix sont dans l’économie informelle, 800 millions de travailleurs gagnent moins de 2 dollars par jour et 53% de la population n’a aucun système de protection sociale”.
Renversement de la responsabilité
Ancien maire de Grande-Synthe aujourd’hui député européen EELV, Damien Carême a tenu à montrer qu’un maire pouvait, par ses choix politiques, avoir un réel impact dans la lutte pour permettre une vie digne à chacun. “Ce n’est pas le logement social qui crée des problèmes, c’est le revenu des gens. Un maire peut décider de faire du logement social. Je ne voulais plus qu’une seule personne dorme dans la rue. C’est possible. C’est une question de choix politique.”
“La pauvreté finit par te faire croire que tu n’es pas un citoyen à part entière. Vivre dans la pauvreté, c’est avoir une étiquette sur le front”, a précisé Évelyne Dubois, en rappelant l’étude présentée notamment par ATD Quart Monde sur les “dimensions cachées de la pauvreté“. Nicolas Duvoux, sociologue et président du Comité national de lutte contre les exclusion, a pour sa part constaté “un mécanisme de renversement de la responsabilité, qui fait que les plus modestes sont considérés comme responsables de leurs situation”. Cela passe notamment par le biais de l’emploi, qui “reste une condition pour s’inscrire dans la société, trouver une place et accéder à une forme de reconnaissance. Mais ce sésame est aujourd’hui inaccessible à une partie croissante de la population”. Alors qu’un accompagnement dédié et personnalisé pour chaque personne en situation d’exclusion est “une obligation légale, la société ne l’a jamais rendue pleinement effective. Elle met donc des personnes dans l’incapacité d’exercer leurs droits, tout en les confrontant à des discours culpabilisants”, a détaillé le sociologue.