Engagés avec ATD Quart Monde, Mitterand Mardoché et Oumar racontent leurs parcours et la manière dont ils perçoivent la lutte pour l’égale dignité en France.
“J’ai grandi au Cameroun, où les droits humains étaient bafoués. Je suis entré dans des mouvances qui se battaient pour libérer le pays, mais vivre là est rapidement devenu impossible pour moi, car j’étais fiché”, raconte Mitterand Mardoché. Sa fuite, en 2013, “tourne très vite au cauchemar”. Il reste trois mois en Turquie, sous la coupe des passeurs, puis passe par la Bulgarie, la Serbie et la Hongrie, avant d’atteindre la France. “On ne sait même plus qui on est. Quand tu arrives en Bulgarie, on te lave au karcher, on te met dans une prison. Partir de chez soi, c’est la chose la plus difficile au monde”, détaille-t-il.
Arrivé à Beauvais, un peu par hasard, il rencontre un couple d’alliés, qui l’invite à la Bibliothèque de rue. “Là, des enfants m’accueillent, me respectent. Ils me montrent que je suis encore un être humain, que je peux être utile.” Peu à peu, il se rend compte que ces enfants vivent aussi dans des conditions très précaires. “J’ai compris que la pauvreté n’était pas seulement matérielle, qu’elle avait bien d’autres dimensions.”
Partout où il va, il s’emploie aujourd’hui à partager son expérience. “Il faut faire de la sensibilisation dans les établissements scolaires, les mairies, les écoles du secteur social. J’explique pourquoi je suis parti de chez moi et pourquoi je ne suis pas un danger ici. Mieux se connaître doit permettre de faire tomber les préjugés”, souligne-t-il.
Mener le combat ensemble
À Montpellier, Oumar fait partie du groupe “d’ici et d’ailleurs” réunissant des militants Quart Monde, des demandeurs d’asile et quelques alliés. Ce Guinéen est arrivé en France fin 2017 après s’être opposé à sa famille en refusant l’excision de sa fille. Désireux de poursuivre son combat pour la dignité, il découvre ATD Quart Monde au forum des associations, en 2018.
“Il est nécessaire de montrer que les personnes venues d’ailleurs peuvent aussi contribuer au combat contre la misère. C’est un combat que nous devons mener tous ensemble”, explique-t-il. Le groupe “d’ici et d’ailleurs” constitue pour lui un réel soutien. “On prend des nouvelles, on cherche des solutions ensemble. C’est presque une famille”, conclut-il.
Photo : Mobilisation devant la préfecture à Montpellier pour trois personnes demandant l’asile. © M-F Combaz