ATD Quart Monde était présent au festival Dialogues en humanité organisé cette année en ligne sur le thème de l’accès digne et durable à l’alimentation. Du 19 au 21 novembre, plusieurs militants Quart Monde et alliés du Mouvement se sont ainsi interrogés sur la manière de “se nourrir avec 57 euros par mois de reste à vivre”.
Pour les éditions précédentes, c’est sous les grands arbres du parc de la Tête d’or, à Lyon, que les participants au festival Dialogues en humanité se retrouvaient. Chacun est resté cette année chez soi, derrière son ordinateur, pour assister aux nombreuses conférences organisées autour de “porteurs d’initiatives positives, de solutions locales et globales”, dont ATD Quart Monde.
Pour répondre à la question “comment se nourrir avec 57 euros par mois de reste à vivre ?”, plusieurs membres du Mouvement sont venus témoigner et mettre en avant les propositions du rapport publié en 2016, “Se nourrir quand on est pauvre”. “Quand on a des enfants, on leur donne la priorité pour qu’ils mangent et, de temps en temps, les parents se mettent à table avec leurs enfants”, souligne ainsi Béatrice Mouton, militante Quart Monde de Lyon.
La grande pauvreté entraîne en effet des privations et à des arbitrages quotidiens pour survivre. Avec 57 euros par mois de reste à vivre pour une personne, “le panier approximatif se résume à des pâtes, du riz, des pommes de terre, du lait, du sucre, de la farine, du thon et des sardines”, détaille Micheline Adobati, militante Quart Monde de Nancy. Elle précise cependant que “quand on est dans la pauvreté, en cuisine on est imaginatif. On sait faire des choses qu’on ne se croyait pas capable de faire”.
Qu’est ce qu’une alimentation digne ?
Les personnes en situation de pauvreté doivent par ailleurs faire face aux nombreux messages de prévention, souvent culpabilisants. “On nous parle des cinq fruits et légumes par jour. Dans les écoles, ils disent que, pour le petit-déjeuner, il faut du jus de fruit, un yaourt, des céréales et un fruit. On fait ce que l’on peut et pas ce que l’on veut. On cherche les moyens de manger, mais d’une autre façon”, précise Béatrice Mouton.
Mais alors, qu’est ce qu’une alimentation digne, se demandent les participants. “C’est manger à sa faim et avoir une alimentation équilibrée”, répond Georges Mouton, militant Quart Monde de Lyon. “Une alimentation digne, c’est une alimentation qui nous permet d’être citoyen avec les autres citoyens”, ajoute Huguette Boissonnat Pelsy, responsable du département Santé d’ATD Quart Monde. “Il n’y a pas que la nourriture, il y a aussi le fait de manger ensemble. Ce qui structure un individu, c’est le fait de faire manger ses enfants, d’apporter la nourriture à la maison. C’est aussi important de pouvoir manger avec des amis, de pouvoir recevoir des gens et de leur donner à manger, d’avoir de quoi construire son lien social, mais aussi d’avoir de quoi suivre les recommandations de notre société”, poursuit-elle.
“L’alimentation digne et durable, à laquelle on aspire tous, c’est aussi une réponse dans le temps, parce que souvent on propose des projets très courts comme un accès à l’épicerie pour trois mois. Et après ?”, demande-t-elle.
Micheline Adobati rappelle que le rapport “Se nourrir quand on est pauvre” comprend plusieurs propositions pour permettre à tous de manger dignement comme les jardins nourriciers ou les achats groupés. Ce rapport préconise en outre “d’encourager la mise en œuvre du droit à l’alimentation”. Cela permettrait ainsi “d’agir pour un objectif de sécurité alimentaire et nutritionnelle tout en mettant au centre des stratégies le respect de la dignité de la personne, de sa vie familiale, de ses traditions culturelles, de son statut de consommateur et de son statut de citoyen, et donc d’agir en valorisant le rôle social de l’alimentation”. Trois ans après la publication de cette étude, ces préconisations demeurent essentielles.
Illustration : Affiche du festival Dialogues en humanité 2020