Le 19 mars dernier, le Conseil régional des personnes accompagnées et accueillies (CRPA) d’Auvergne-Rhône-Alpes s’est réuni à Riorges pour une journée de travail dédiée à la maltraitance institutionnelle. Des membres d’ATD Quart Monde de Lyon et Saint-Étienne ont présenté le plaidoyer Stop à la maltraitance institutionnelle pour lancer les échanges.
Dans la Salle du grand Marais de Riorges, l’ambiance est détendue avant de démarrer cette nouvelle journée d’échange du Conseil régional des personnes accompagnées et accueillies (CRPA) d’Auvergne-Rhône-Alpes. Certains se connaissent bien et d’autres sont un peu plus nouveaux. On s’affaire sur la technique pour bien commencer à l’heure. La cinquantaine de personnes présentes s’installe timidement autour des huit grandes tables. Après un premier mot d’accueil, des délégués du CRPA expliquent ce que sont les CRPA. Il s’agit d’une instance de rencontres, de débats et de propositions sur l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques dans le champ de l’hébergement et de l’insertion, et plus globalement, de la lutte contre la pauvreté. D’autres délégués introduisent le sujet du jour : la maltraitance institutionnelle. Avant de lancer la présentation, il est demandé à chacune et chacun d’écrire sur un post-it ses attentes concernant ce sujet. Certains sont en attente d’être « écouté », d’autres veulent comprendre « ce que dit la loi ». D’autres encore veulent « échanger », savoir « comment les usagers perçoivent les institutions » et « réfléchir à des solutions ».
Des exemples de maltraitance institutionnelle
Les membres d’ATD Quart Monde démarrent leur présentation en passant la vidéo du témoignage de Laetitia, qui expose clairement une situation de maltraitance institutionnelle. Ensuite, Françoise, militante Quart Monde du groupe de Lyon, présente deux exemples qui sont dans le plaidoyer du Mouvement. Au micro, elle souligne « la maltraitance institutionnelle c’est quand tu as oublié de remplir un papier et qu’ils te suppriment le versement du RSA en une semaine et ça prend 3 mois pour le toucher de nouveau ». Les militantes Quart Monde du groupe de Saint-Étienne, Josiane, Djamila et Hélène, enchaînent : « À la CAF, on nous reconnaît comme des personnes avec des petits revenus rien qu’avec notre numéro d’allocataire, il y a un code… et on est plus contrôlé que les autres ».
Avec ces exemples, le décor est planté. Dans l’assistance, on écoute avec intérêt. Geoffrey, délégué national d’ATD Quart Monde, explique ensuite l’histoire de ce travail sur la maltraitance institutionnelle. Il décrit les mécanismes identifiés dans les exemples qui ont été partagés et expose les propositions que fait le Mouvement pour lutter contre la maltraitance institutionnelle : garantir des moyens convenables d’existence et remettre de l’humain dans les services publics.
À la fin de ce temps de présentation, des mains se lèvent pour poser des questions ou raconter une situation. Une personne souligne que la maltraitance institutionnelle s’est accentuée depuis la période du Covid, notamment parce que la dématérialisation s’est accélérée. Une autre exprime qu’à la CAF, « ils n’ont que 8 minutes par personne ». Il y a aussi de l’empathie vis-à-vis des professionnels dont les conditions de travail sont parfois très difficiles en raison du manque de moyens.
« Faire entendre une voix collective »
Les échanges se poursuivent en petits groupes dans lesquels plein d’exemples sont partagés. Concernant une situation liée à l’Aide sociale à l’enfance, une personne précise : « c’était pas nous le problème, c’était notre situation le problème ». Une autre personne explique qu’après un parcours en foyer, elle s’est retrouvée à la rue à ses 18 ans. Hélène, militante Quart Monde de Saint-Étienne raconte qu’elle avait souhaité être accompagnée par une personne de confiance pour un rendez-vous avec une éducatrice de l’ASE, ce qui est son droit. L’éducatrice a refusé que la personne puisse entrer dans le bureau.
Au fil des témoignages et des situations partagées, une question s’impose : qu’est-ce qu’on peut y faire ? Dans les histoires, il y a parfois un certain fatalisme. Les situations sont souvent tellement bloquées et les gens ont tellement essayé en vain, qu’ils sont découragés et fatigués. Pour répondre à cette fatalité, les uns et les autres insistent sur l’importance de ne pas rester seul et de se mettre en groupe pour faire entendre une voix collective.
L’après-midi, après un échange avec Marc Suchon, délégué du Défenseur des droits à Lyon et allié d’ATD Quart Monde, les groupes se remettent au travail pour essayer de répondre à la question : « Qu’est-ce qui manque pour lutter contre la maltraitance institutionnelle ? ». Parmi les idées des groupes : plus de personnel dans les services publics, une campagne de prévention à grande échelle, instaurer davantage de dialogue avec les institutions, faire une campagne d’information sur les droits, davantage aller vers les personnes, mettre en place un observatoire… L’équipe du CRPA va maintenant rassembler toutes les idées pour en faire une synthèse qui pourra être utilisée par chacun et chacune. Cette journée de travail a été un moment fort de partage et de mobilisation pour ATD Quart Monde. Geoffrey Renimel
Photo : Présentation des membres du groupe de Saint-Etienne aux membres du Conseil régional des personnes accompagnées et accueillies (CRPA) d’Auvergne Rhône Alpes le 19 mars 2025. © ATD Quart Monde