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Sport pour tous et toutes [270]
En analysant la place relative et équivoque des pratiques sportives dans les quartiers pauvres en France et en Europe, ce numéro s’interroge sur les conditions à respecter pour faire du sport un réel outil d’intervention sociale.
Description
Synonyme de dépassement de ses limites, de bonne santé, facteur de bien-être et de confiance en soi, occasion de rencontre et d’entraide, le sport semble n’apporter que des bienfaits, rappelés à grand renfort de médiatisation en cette année où la France accueille les Jeux olympiques.
Pour les populations les plus défavorisées à travers le monde, le sport favorise-t-il vraiment le vivre ensemble ? Quelles possibilités sont proposées dans les quartiers (et en milieu rural) où vivent ces populations ? Quels peuvent être les freins à leur participation ? Les femmes pratiquent-elles une activité sportive ?
Le Conseil de l’Europe contribue à rendre le droit au sport effectif pour tous et toutes, en s’appuyant sur la Charte européenne du sport et en soutenant les projets innovants. Cependant, les enquêtes analysées par le sociologue Gilles Vieille Marchiset, sont unanimes : un faible niveau d’études et un niveau de revenu bas sont associés à une absence de pratiques sportives, d’autant plus chez les femmes et quand l’âge avance. Laurence Munoz met en lumière les nombreux freins qui restreignent la pratique du sport pour les personnes en situation de précarité, et la difficulté de réunir les conditions de réussite : « Le sport, ce n’est pas pour moi. »
En Afrique, des jeunes rêvent de migrations sportives qui, mal préparées, se soldent souvent par l’échec et des drames. L’association Passeur de rêve essaye de protéger ces enfants de leurs propres rêves de foot, et des prédateurs qui les utilisent. Dans ce paysage qui s’apparente à un terrain miné, certain·e·s se sont frayé un chemin possible et solidaire. Boubkeur pratique la boxe amateur pendant plus de dix ans à Montreuil, avant de passer ses diplômes d’entraîneur et de continuer à transmettre les valeurs de son art à la jeunesse : « N’oublions pas que dans l’hexagone et en particulier dans le neuf-trois, les JO sont un gâteau qu’il faut partager ! » En Éthiopie, où l’âge moyen de la population est d’environ 20 ans et 42 % souffrent de « pauvreté multidimensionnelle sévère », « Le skateboard permet aux jeunes Éthiopiens de se sentir libres. » Grâce à l’action de militant·e·s et d’associations engagées, la boxe en Espagne, l’escrime à Nairobi, le « football social » à Rome, le basket-ball aux Philippines représentent bien plus qu’un simple loisir. Le sport devient pour les pratiquant·e·s un véritable refuge, une échappatoire loin du crime, de la drogue et des pressions sociales qui pèsent sur leurs quartiers, une fierté. Soutenons ces initiatives qui, parfois, dérangent, pour qu’elles résistent comme lieux de respect mutuel, d’accès à la citoyenneté et de cohésion sociale.
Martine Hosselet-Herbignat