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Idées fausses : « Les pauvres sont des fraudeurs » C’est faux !

Faux. Ils fraudent beaucoup moins que les autres.

Il ne s’agit de nier ni la fraude aux prestations sociales, ni la nécessité de lutter contre elle. Mais elle est très faible par rapport aux autres types de fraudes – notamment la fraude fiscale.

Dans un rapport, la Cour des comptes estimait à un milliard d’euros, le montant de la fraude aux organismes sociaux – tous confondus – détectée en 2019(1). Le taux de fraude estimée sur le RSA, la prime d’activité et les aides au logement tourne autour de 6%. Ces montants ne sont pas négligeables, mais restent minimes par rapport à la totalité des bénéficiaires, soit 2,1 millions d’allocataires du RSA).

La fraude des pauvre est finalement une « pauvre fraude » quand on la compare à l’ampleur estimée de la fraude fiscale (estimée par le Ministère des finances à plus de 70 milliards d’euros par an). C’est également bien plus faible que le montant des aides non distribuées du fait du non recours au droit, qui permet à l’Etat de faire près de 10 milliards d’économie, selon un rapport de l’Odenore.

Pour autant, le contrôle est légitime. Mais il devient insupportable lorsqu’il est vécu comme une suspicion obstinée. Or, les procédures très normées du RSA amènent à aller vers plus de contrôle grâce à un traitement de masse des problématiques et non vers un accompagnement renforcé : l’absence aux réunions d’information, la non-signature de la lettre d’engagement, la non-contractualisation, etc., sont autant d’indicateurs qui permettent au d’identifier les allocataires ne se conformant pas à la procédure. Aussi, depuis quelques années, l’activité de contrôle a pris une dimension industrielle. En 2020, on dénombre 32 millions de vérifications automatiques, 4,3 millions de contrôles sur pièces 234 000 et 106 000 contrôles sur rendez-vous ou au domicile pour 36 917 erreurs et fraudes aux allocations repérées, équivalant à 255 millions d’euros(2).

Certains bénéficiaires se voient sanctionner pour n’avoir pas déclaré les revenus que leurs enfants ont gagnés en stage. Dans certains cas, des agents de la CAF se rendent, sans prévenir, au domicile, interrogent les voisins, traquent le moindre indice. Certains départements procèdent même à des contrôles de masse en convoquant toutes simultanément 500 à 800 personnes, et les absents non excusés sont sanctionnés. En 2019, 115 000 foyers auraient subi ce sort, selon une enquête d’Aequitaz et du Secours catholique publiée en octobre 2020.

Ce contrôle accru et insistant est d’autant plus insupportable que dans le même temps, l’Etat ne remplit pas son rôle d’accompagnement des bénéficiaires. Comme le rappelle l’Odas, en 20 ans, les dépenses d’accompagnement sont passées de 20% à 7% du budget dédié ! Ainsi, selon la dernière étude de la Drees sur l’accompagnement des bénéficiaires du RSA (2019), seul 25 % des bénéficiaires du RSA bénéficient d’un accompagnement renforcé et 5 % d’entre eux font l’objet d’un accompagnement global. 12% des bénéficiaires du RSA n’avait même eu aucune orientation vers un « parcours d’insertion » au bout d’un an.

[Article mis à jour en janvier 2022]

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(1) La lutte contre les fraudes aux prestations sociales. Rapport de la Cours des Comptes – Septembre 2020
(2) La politique de prévention et de lutte contre la fraude des CAF en 2020 –  Rapport de la CNAF – Juin 2021
(3) Sans contreparties. Pour un revenu minimum Sans contreparties – Rapport Aequitaz et Secours catholique – Octobre 2020
(4) Les dépenses départementales d’action sociale en 2017 – Lettre de l’Odas – Mai 2018
(5) L’orientation et l’accompagnement des bénéficiaires du RSA : légère baisse des délais d’orientation en 2019 – Rapport de la Drees – Décembre 2020