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La journée d’études sur l’expérimentation Territoires Zéro chômeur de longue durée vue de l’intérieur

D’une initiative associative ATD Quart Monde à un projet d’Etat : ce que nous retenons de la journée d’hier, mercredi 30 mars, journée Territoire Zéro Chômeur de longue durée, à l’Assemblée Nationale.

Un mercredi après-midi, plein Paris sous une météo capricieuse : c’est ainsi que débute cette cruciale journée d’étude à l’Assemblée nationale. Pourtant, dès 8h30, une petite file d’intervenants, journalistes et auditeurs se forme devant l’entrée de la salle Victor Hugo. Des connaisseurs, des débutants, des contestataires et des observateurs. Il faut croire que le projet a fait mouche auprès d’un large public.

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9h30 la salle se remplit, en bas, seuls 2 sièges restent vacants lorsque Laurent Grandguillaume introduit la journée.

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C’est Laurent Grandguillaume, député de Côte d’Or qui a porté la proposition de loi au Parlement, jusqu’à ce qu’elle soit votée à l’unanimité en février dernier. Avec cette introduction, on fait un petit retour en arrière, on se rappelle les premières prises de contacts et les premiers groupes de travail formés pour le projet. Des piqûres de rappels pour montrer que ce projet est issu d’un long travail de réflexion et d’études et d’une grande collaboration.

Intervient ensuite Patrick Valentin, initiateur du projet au sein du Mouvement ATD Quart Monde. Il revient sur les grandes étapes du projet, comment on est passé d’une utopie à un projet réalisable. Tout le monde est concerné : la mobilisation d’aujourd’hui et l’unanimité du vote parlementaire d’hier le démontrent. Unanimité qui, comme le rappelle Patrick Valentin « ne signifie pas un accord de tous sur tout les points, mais bien un accord commun sur l’objectif final : en finir avec ce fléau que l’on nomme chômage ». C’est dit. Et le public présent en est le symbole. Sur plus de 300 personnes, la salle se scinde entre habitants d’Ile-de-France et une majorité d’autres régions, entre ceux qui travaillent déjà dans le sens de l’expérimentation et ceux qui veulent en savoir plus, mais tous se retrouvent sur un point : plus de la moitié partage des liens avec une personne victime d’un chômage de longue durée. On retrouve cette unanimité.

Julie Boiveau, facilitatrice graphique, a retransmis toute la complexité des échanges en dessins tout au long de la journée.

Plus concrètement

Didier Goubert, membre de l’équipe nationale du projet, revient donc sur les grandes lignes du sujet. Territoire Zéro Chômeur de longue durée s’est avant tout construit sur une idée en trois grandes lignes :
– il y a beaucoup de gens qui veulent travailler
– il y a beaucoup de travaux utiles pour la société
– et ce n’est pas l’argent qui manque

Quand on sait que le coût du chômage de longue durée représente au moins 15 000 euros par an par personne, on peut se demander pourquoi tant de barrières pour sortir du chômage quand il coûte tant à entretenir.
Mais le projet pourrait conduire à des écueils qu’il faudra éviter notamment la question de la concurrence avec le secteur traditionnel marchand avec, à terme, une destruction de l’emploi traditionnel. A ces questions, Didier Goubert répond que dans cette expérimentation, ce sont ceux qui sont concernés par le projet, à savoir lescomités  locaux des territoires d’expérimentations, qui seront les maîtres des situations. En effet, qui saurait mieux ce dont a besoin sa commune ?

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10h15, Première table ronde « de l’idée initiale à la mobilisation des acteurs ». On donne la parole aux concernés, à ceux qui veulent sortir du chômage, à ceux aussi qui vont tout mettre en place, à ceux qui connaissent les besoins. Cette table ronde est un état des lieux qui fait ressortir à quel point ce projet est une « histoire d’humains ». Une histoire de consensus par le dialogue, pas toujours aisé, entre les chômeurs, les associations et les institutions. C’est cette volonté qui a permis, sans relâche, depuis plus de 5 ans, de faire en sorte que ce projet voie le jour, en combattant les réticences des uns et les appréhensions des autres. De cette table ronde enfin, ressort la satisfaction d’être ici, à l’Assemblée Nationale, d’être entendu.

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Si la motivation était palpable à cette table ronde, la suivante, uniquement composée d’élus, était aussi bien présente. La première intervention a rappelé que « trouver un travail c’est important, mais retrouver sa dignité l’est encore plus. » Entendre que ce projet est avant tout un projet humain fait chaud au cœur et confirme que, de l’institution politique à l’observateur, tout le monde s’accorde sur cela. « Ne pas perdre notre dignité », un message fort qui rappelle pourquoi nous sommes là et pourquoi nous œuvrons tous les jours. Les élus exposent leurs espoirs et leurs inquiétude. Si trouver des demandeurs d’emplois et impulser cette dynamique semblent presque évidents, il faut aussi convaincre les entreprises et ne pas effrayer les autoentrepreneurs. Actuellement, dans les territoires d’expérimentations, de nombreuses études sont menées pour ne pas empiéter sur d’autres emplois.

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La journée continue, on a l’impression d’être au cœur d’une plénière de l’Assemblée nationale. Chaque personne vient s’exprimer, on appelle des victimes du chômage de longue durée à affirmer leur compétences, leurs envies et elles sont multiples ! Du jardinage, du travail avec des enfants, des plantations, de la menuiserie… tout un panel d’activités et de compétences qui ne demandent qu’à être mises en pratique.

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Des nombreuses compétences, de nombreux candidats… mais comment on s’organise avec la création d’emploi ? Comment, à partir de compétences, on co-construit un emploi ? Comment créer ces Entreprises à But d’Emploi ? Zoom sur l’atelier de réflexion sur les travaux utiles non réalisés. Les élus des collectivités territoriales expliquent leurs démarches de travaux croisés. Cette démarche de travaux croisés implique une grande concertation des Communautés de Communes entre les demandeurs d’emploi et les directives de l’agenda 21. En somme, si l’on accorde les savoir-faire et la connaissance des besoins, il est toujours possible d’inscrire de nouvelles manières de fonctionner dans un système institutionnel ; Territoires Zéro Chômeur de longue durée, c’est « construire ensemble une aventure commune ».

Zoom en image sur le financement

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Comité de vigilance

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En dernier chapitre de cette journée, une attention particulière est apportée au comité de vigilance citoyen. Table ronde introduite par Claire Hédon, présidente d’ATD Quart Monde France, avec Laurent Grandguillaume et par Dominique Potier.

Les président/e/s des associations partenaires (Emmaus, Secours Catholique, Pacte civique), les députés, les territoires déjà engagés ont ensuite lu les différents points de la charte du Comité de vigilance.

Ce comité de vigilance citoyen est crucial dans le projet, il permet à tous ceux qui s’intéressent au projet (associations, territoires, citoyens…) de veiller au bon déroulement du projet et de répondre à ses éventuelles dérives.

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Territoires Zéro Chômeur ? Quel impact sur le vivre ensemble ? Prendre un problème de société, tel que le chômage, à l’envers, cela nécessite une grande organisation afin que personne ne soit perdant. Ce comité de vigilance citoyen doit s’atteler à trois grands sujets de vigilance :
– des données qui s’appliquent à la conduite territoriale du projet
– des données qui s’appliquent à la conduite nationale du projet
– de la non-exclusivité et non sélection des candidats au projet

Cette expérimentation démarre consciente de son potentiel, mais aussi de ses points de battements et le comité de vigilance citoyen est le dépositaire de ces deux parties.

20160330_162735Pour conclure, Myriam El Khomri, ministre du travail, est venue écouter le résumé de la journée et les ressentis de quelques personnes dans la salle. Elle a exprimé son point de vue et celui du gouvernement. Si son discours a clairement mis en avant le grand travail réalisé, ce qui transparaissait le plus était l’union évidente de toutes les parties prenantes du projet : les associations, les travailleurs, les demandeurs d’emplois, les observateurs, les institutionnels… La ministre a reconnu que Territoires Zéro Chômeur de longue durée avait une capacité de cohésion assez rare tant dans le domaine de la politique que dans l’espace public, et c’est en cela que ce projet est à part, une manière probante de dire que le chômage est l’affaire de tous, et de le prouver.

Beaucoup d’espoirs mais aussi et surtout beaucoup d’attentes sont mises dans ce projet, qu’ATD Quart Monde et ses partenaires portent fièrement. Les convaincus sont partis la tête haute et les observateurs sont partis convaincus.

Lara Fabre