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Inégalités économiques et système des inégalités au Sénégal

Inégalités économiques et système des inégalités au Sénégal

Des travaux récents en sciences sociales au Sénégal ont permis de mettre en évidence un système de cumul et de reproduction des inégalités qui entraîne maintien et accroissement de la pauvreté.

7 personnes sur 10 au monde vivent aujourd’hui dans un pays où l’écart entre les riches et les pauvres est plus grand qu’il y a 30 ans. Autrement dit, dans une grande majorité de pays, une minorité riche se partage une part sans cesse plus importante des revenus nationaux.

Un aperçu des inégalités économiques actuelles au Sénégal :
– Les 20% les plus riches concentrent 46,8 % de l’ensemble des revenus, alors que les 20% dont les revenus sont les plus faibles se partagent seulement 6%.
– Les 20% les plus riches consomment sept fois plus que les 20% les plus pauvres.
– Les disparités de revenus sont très fortes selon les lieux de résidence et, en particulier, entre les zones urbaines et les zones rurales.
– Les impôts indirects représentent 63,79% des recettes fiscales, dont 40% pour la TVA. Le système fiscal est donc peu redistributif.
– Plus de 90% des travailleurs ne disposent pas de protection sociale (congé payé, congé maladie, assurance sociale…), en particulier dans le secteur informel urbain et dans l’emploi rural.
– Un Sénégalais retraité sur 10 touche une pension de retraite ; mais moins de 2% des femmes bénéficient d’une retraite.
– La prise en charge du risque maladie ne concerne que 20% de la population, dont 60% sont des employés du secteur moderne.

Comment la permanence des inégalités en font un système qui se reproduit constamment :
– Les inégalités se renforcent les unes les autres, entraînant l’accumulation de handicaps pour les plus pauvres et l’accumulation de privilèges pour les plus riches.
– La fluidité sociale est très faible si bien que la position sociale des individus demeure fortement déterminée par leur origine sociale.
– L’inégalité des chances dans l’accès aux études (et plus précisément aux diplômes supérieurs) est de nature à entraîner une reproduction plus accentuée des élites politiques.
– L’accès des enfants à chacun des niveaux d’enseignement est d’autant plus faible que les ménages sont pauvres.

En conclusion, « On ne comprend rien, ou alors pas grand-chose, à la pauvreté si on la déconnecte de la question qui est celle des inégalités. L’Afrique d’ailleurs, ce n’est pas seulement le continent de la pauvreté massive, c’est aussi celui qui affiche les inégalités de revenus les plus élevées au monde.»
Les politiques publiques s’attachent plutôt à accélérer la croissance comme si les inégalités pouvaient se résorber toutes seules.
Les chercheurs en sciences sociales africains doivent « parvenir à développer autour des inégalités des analyses, des approches et des théories qui rendent davantage compte des spécificités (sociales, culturelles, économiques, politiques, etc.) africaines ».

Annick Mellerio

Editions L’Harmattan – 2017 – 145 p.