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Contre la pauvreté au Japon

Contre la pauvreté au Japon

Ce livre est une description de la société japonaise face à la redécouverte de la notion de pauvreté au début du XXIe siècle. Des initiatives tentaient alors de se développer contre ce fléau qui contrevenait à l'image de la réussite économique du pays, initiatives disparates, peu reconnues par la majorité des Japonais et ignorées par le gouvernement.

A l’époque où ce livre fut écrit, en 2007-2008, le terme de pauvreté  illustrait exclusivement la pauvreté massive qui avait suivi la défaite de 1945. La société japonaise se cantonne alors dans un refus d’affronter une réalité dérangeante. Pour elle, la pauvreté relève de la responsabilité individuelle et n’est pas un problème social, les pauvres sont souvent des fraudeurs ou des paresseux.
A l’inverse, pour l’auteur  « la question de la pauvreté n’est pas celle de celui qui est pauvre, mais celle de la société ». Il se demande si le Japon n’était pas en train de se transformer en une société toboggan, « dans laquelle il suffit de glisser un peu par inadvertance, pour ne pouvoir se raccrocher à quoi que ce soit et être condamné à tomber jusqu’en bas ».
La position du gouvernement, après enquête auprès des foyers pauvres, pouvait se résumer à cette communication : « la pauvreté telle qu’elle se présente au Japon n’est pas un grand problème en soi ». C’est à partir de ce constat que fut justifiée une dévaluation de la Protection vitale (équivalent RSA)…

Dans un chapitre intitulé Opposition au business de la pauvreté, l’auteur explique que l’État a laissé les entreprises procéder à l’instauration d’horaires de travail, avec des rémunérations  plus basses, et à des dérégulations successives sur les lois du travail intérimaire, « [la] segmentation du travail et [la] précarisation de l’emploi se sont développées à l’extrême au Japon » : un business très rentable pour les entreprises !

Il insiste à partir de la notion de capability d’Amartya Sen (qu’il traduit par la notion japonaise de tame) sur la nécessité de développer ces tames dans chaque individu. Mais là encore il se demande « si la société japonaise dans son ensemble ne se trouve pas complètement dépossédée des facultés politiques, sociales et organisationnelles qui lui auraient été nécessaires pour augmenter les tames de ceux qui connaissent une situation de pauvreté ». Dans son dernier chapitre Repartir à zéro, il conclut : « Peut-être est-il temps de se demander jusqu’à quand la société japonaise va se contenter de se taire et de regarder ces personnes en silence. »

Depuis la création de son association Moyai en 2001, Yuasa Makoto n’a cessé d’agir suivant deux axes principaux : « d’un côté, trouver un logement et apporter une garantie suffisante à des personnes sans domicile fixe. Et de l’autre, écouter, en consultation, ceux et celles qui éprouvent des difficultés pour vivre. »

Dans la préface à l’édition française, écrite en 2018, l’auteur note qu’après la crise économique de 2008 le gouvernement a reconnu l’existence de la pauvreté au Japon mais, pour la réduire, il compte plus sur la relance économique  que sur la protection sociale. Par contre, la société commence à se mobiliser localement, en particulier pour lutter contre la pauvreté des enfants.

Jean-Pierre Touchard

Éditions Picquier – 270 pages – 2018 (publié au Japon en 2008)