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Confessions d’un enfant de La Chapelle

Confessions d’un enfant de La Chapelle

Les souvenirs d'enfance d'un auteur de romans policiers, dans un style truculent.

Tous ceux qui affectionnent les ouvrages sur ce que fut la vie du monde populaire dans le premier quart du vingtième siècle ou qui ont une raison de s’intéresser plus particulièrement à ce quartier du 18ème arrondissement de Paris, enclavé entre les voies ferrées des gares du Nord et de l’Est, se délecteront en lisant ou en relisant cette autobiographie de l’auteur de Touchez pas au grisbi. Il la publie seulement à l’âge de 72 ans (trois ans avant sa mort en 1980), après une carrière d’homme de lettres (romans policiers, scénarios de films, feuilletons et dramatiques pour la télévision) et elle ne concerne que son enfance jusqu’à l’âge de 17 ans, c’est-à-dire jusqu’à la mort de son père en 1922. Sa mère, décédée quelques années auparavant, l’avait prévenu : « Nous ne serons pas toujours là …un jour tu seras à tes croûtes ! »

Souvenirs d’enfance donc, mais quelle enfance !

« Je suis venu au monde à crédit. Mon père, qui traquait l’outsider sur les hippodromes de la région parisienne, devait mettre deux années, thune après thune, à honorer Mme Weber, la sage-femme qui venait de délivrer ma brave maman. Il ne s’agissait pourtant que de cinquante francs ! ». C’est ainsi qu’il commence le récit de sa vie, qui se poursuit sans discontinuité (l’ouvrage ne comporte pas de chapitres). S’entremêlent les événements familiaux (la vie quotidienne dans le petit logis de la rue Riquet et les relations avec la parenté), la fréquentation de l’école communale de la rue de Torcy, la description des diverses activités auxquelles se livrent les artisans et les commerçants du voisinage, les lieux de distraction les plus prisés, les aventures rocambolesques et parfois illégales où se forgent les complicités ou les inimitiés des jeunes prompts à en découdre entre bandes rivales, mais aussi les répercussions sur le quartier de la guerre de 1914-1918.

Ce qui donne lieu aux plus amples développements, ce sont les innombrables petits boulots auxquels l’auteur a eu recours pour gagner quelques sous, tant pour lui que pour sa famille, dès la sortie de l’école primaire. Sans jamais parvenir à se fixer dans aucun d’eux. Pour autant il ne connaît pas le chômage, car à cette époque les occasions de se faire embaucher ne manquent pas. Parallèlement, on assiste à l’éclosion progressive de son intérêt à tenter des approches auprès des filles, mais elles ne sont guère couronnées de succès.

Albert Simonin a un style alerte et fleuri bien à lui. Il excelle à rendre les sensations et les sentiments qui ont habité l’enfant et le jeune homme qu’il a été, au cœur d’une réalité dure à vivre mais à l’égard de laquelle il conserve une tendre nostalgie.

Daniel Fayard

Gallimard – Folio – 1984 – 288 p.