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Combats et métamorphoses d’une femme

Combats et métamorphoses d’une femme

Ce petit texte autobiographique d'à peine 100 pages rend un bel hommage à toutes les femmes qui, comme la mère de l'auteur évoquée ici, n'ont pu ni se réaliser, ni accomplir leurs rêves, ni mettre en valeur leurs capacités, à cause de leur milieu d'origine et du rouleau compresseur qui en découle : le manque d'argent, un mariage précoce, des enfants trop vite arrivés, l'alcoolisme et la violence des hommes…

Illustré de quelques photos comme on en trouve dans les biographies de personnes célèbres, l’auteur exhume d’une vie globalement sordide et triste, quelques souvenirs qui mettent le projecteur sur la résistance de sa mère, sa capacité à entretenir au fond d’elle-même une petite once de joie, d’énergie et d’espoir de changement, ces combats qui finissent par aboutir à une métamorphose.

Pourtant, si on a lu le premier récit qui a révélé Edouard Louis comme écrivain, En finir avec Eddy Bellegueule, description virulente d’une enfance terrible dans une famille où dominent la violence, la bêtise, la vulgarité et l’homophobie, le contraste avec ces souvenirs lumineux, la tendresse adressée à sa mère, cette sorte de réhabilitation, peuvent créer, chez le lecteur, un certain malaise, de même que le rôle que s’attribue l’auteur dans la métamorphose de sa mère. Le récit raconte en effet l’étonnant basculement des relations mère-fils. Après que l’auteur se soit coupé radicalement de sa famille, ou peut être grâce à cet éloignement vital pour lui, il  se rapproche d’elle jusqu’à occuper une place privilégiée de confident et faire de lui un levier de libération pour sa mère.

Ces  récits autobiographiques n’en sont pas moins intéressants par leur façon concrète, vécue, d’explorer les mécanismes d’oppression de classe sociale et la complexité des effets d’un changement de classe pour celui qui l’opère et pour son entourage.

Brigitte Bureau

Editions du Seuil – 2021 – 128 p.