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Babeuf Écrits

Babeuf Écrits

Autodidacte influencé au départ par les idées des philosophes du XVIIIe, obsédé par les inégalités et par la misère qu’il rencontrait partout et vivait le plus souvent, Babeuf n’a cessé dès 1789 d’entretenir l’esprit révolutionnaire afin d’instaurer une vraie libération de l’homme, le "bonheur commun" et "l’égalité de fait". Il meurt sur l’échafaud en 1797.

Textes choisis de Gracchus Babeuf  

La personnalité hors du commun de Babeuf a intéressé de nombreux historiens […]. D’une certaine manière, le XIXe siècle a « inventé » Babeuf en le construisant comme l’un des précurseurs du communisme, avec les réserves émises, comme on le sait, par Marx. Mais que lit-on de Babeuf, dont la pensée est trop souvent réduite au travail mis en forme par Sylvain Maréchal et connu sous le titre de « Manifeste des Égaux » ? Et peut-on encore l’associer à ce mot de communisme qu’on ne rencontre jamais sous sa plume ?

On trouvera dans ce volume près de 300 pages d’écrits de Babeuf, contextualisés et commentés par Claude Mazauric qui, par ailleurs, a rédigé une forte introduction prenant à la fois la forme d’une biographie classique et celle d’une biographie intellectuelle, élargie à une époque, la fin des Lumières qui voit Babeuf se former de manière plutôt autodidactique. On observe donc l’émergence du futur « Marat de Picardie », sa très forte sensibilité à l’inégalité, son parcours politique, sa progressive radicalisation, motivée par une déception croissante face aux tiédeurs réformatrices des révolutionnaires, y compris jacobins. En 1793, François-Noël devient Gracchus et entend agir pour la promotion de la loi agraire.

Le choix des textes rend à Babeuf toute sa place dans l’histoire des idées. La précocité et la radicalité de l’analyse sociale (dès les lettres de 1786-1787) sont frappantes, ainsi que la netteté de son plaidoyer en faveur des droits des femmes. On suit l’évolution de cette pensée qui se donne pour but « l’égalité de fait » ou la « pure égalité », incrimine les effets dissolvants de la propriété, placée au cœur de tout le système babouviste, en appelle à l’insurrection pacifique ou à la « Vendée plébéienne », condamne puis absout Robespierre, soutient puis combat le Directoire, accusé de faire régner une nouvelle Terreur dirigée contre le peuple, un autre mot-clé du vocabulaire babouviste. Hostile à la Terreur, Babeuf est, à sa manière, un thermidorien dont les positions apparaissent alors pour le moins contradictoires avec la « loi agraire »… Homme de presse, hostile à la violence et au massacre, le publiciste se fait le critique radical […] du « système de dépopulation » mené lors de la guerre civile de Vendée, applaudissant au passage à l’interdiction du club des Jacobins. Sur ces points au moins Babeuf annonce un certain nombre de théoriciens du socialisme dit utopique […].

Dans son avertissement, Claude Mazauric revient sur sa lecture passée de Babeuf : sans la renier, il explique en quoi cette lecture téléologique n’est plus recevable de nos jours, et c’est tout à son honneur […]. Lire Babeuf, c’est accepter de lire une pensée en perpétuelle interrogation, radicalement subversive en ce qu’elle soumet l’action politique à la question sociale. Mais, plus encore, lire Babeuf, c’est une invitation à débattre d’une question centrale : qu’est-ce qu’une révolution, et comme forme, et comme finalité ?

Extraits d’un article de Jean-Claude Caron dans la Revue d’histoire du XIXe siècle n° 40, 2010.

Le Temps des cerises – 2009  (4e édition) – 418 p.