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Le destin au berceau
- École, Inégalités
Description
Inégalités et reproduction sociale
Depuis 30 ans, la reproduction sociale a cessé de diminuer en France et les inégalités se creusent à l’intérieur d’une génération. La démocratisation scolaire montre ses limites :
– depuis le milieu des années 1990, la part des bacheliers dans la population scolaire s’est stabilisée en deçà de 65 % ;
– 120 000 jeunes sortent du système scolaire sans diplôme ou avec le niveau du brevet des collèges ;
– deux jeunes sur trois ne sont pas titulaires du baccalauréat général ;
– les différentes filières – par exemple celles du baccalauréat – ne préparent pas au même avenir et sont très clivées socialement.
Or plus le diplôme est élevé, plus la probabilité d’être au chômage est faible et plus l’accès à un emploi stable est rapide. Par ailleurs, même à diplôme égal, l’origine sociale joue sur la catégorie socio-professionnelle de l’emploi exercé.
L’élitisme du système scolaire français a pour conséquence la recherche d’une excellence réservée à quelques élus issus, toujours plus fréquemment, des milieux favorisés, tandis que les vaincus de la compétition scolaire sont voués au destin d’élèves puis de citoyens de seconde zone. Comparée aux pays de l’OCDE, la France dépense moins pour la scolarisation maternelle et primaire et plus pour le collège, et plus encore pour le lycée, alors que ce sont les premières années de scolarisation qui peuvent permettre le plus d’efficacité dans la réduction des inégalités subies par les enfants des classes défavorisées. Les enquêtes PISA montrent pourtant « que les pays dans lesquels l’écart entre favorisés et défavorisés est le plus faible sont également ceux qui obtiennent les meilleures performances d’un point de vue global ».
Actuellement le taux d’accès à la formation continue, en France, s’élève en même temps qu’augmente le niveau du diplôme initial.
En ajoutant un accès dès 18 ans aux allocations pour les jeunes qui ne sont ni en emploi ni en formation, on favoriserait leur accès à l’autonomie, on lutterait contre la sensation de ne pas maîtriser leur destin, sensation qui engendre une désaffiliation sociale et le sentiment d’être exclus.
En conclusion, l’auteur ajoute : « Pour diminuer le poids de la reproduction sociale, il ne suffira pas de rendre la compétition pour les places plus juste, moins marquée par le sceau de l’origine. C’est aussi contre la dualisation de la société qu’il faut lutter, par l’égalisation des emplois, des conditions de travail, des statuts, des rémunérations. Il s’agit de la place que la société accorde à celles et ceux, nombreux, qui œuvrent dans l’ombre des vainqueurs, et souvent à leur service ».
Annick Mellerio
Éditions du Seuil – La République des idées – 2013 – 122 p.