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La manche
Analyse
Ce premier roman de l’auteur, d’une centaine de pages, nous emmène dans les rues de Paris, plus particulièrement dans le 5ème arrondissement. Ce livre est dédié à Gilou emporté par le froid le 14 février 2023 sur la place Flora-Tristan.
Le narrateur est jeune, 20 ans, à la rue avec encore un peu d’espoir lui permettant d’appeler le 115 même si les appels restent le plus souvent sans réponse. « Sans espoir je ne dormirai pas ».
Ce n’est pas comme Philippe qui se dit vieux et qui n’a plus la force d’attendre un camion qui ne viendra pas. Philippe n’a plus d’espoir mais il a des livres. Les bourgeois, constate le narrateur, aiment les clochards qui lisent, « ça donne une image très belle de la misère » et comme disent ses copains « c’est une bonne chose pour que les gens nous tolèrent. » Mais pourquoi Moussa, « le noir du Sénégal », n’a pas autant de succès ? Il sourit aux passants, il est toujours poli mais ça ne prend pas. « C’est fou comme les gens choisissent leurs pauvres » !
Ainsi on fait connaissance de ses amis. Tamás le Rom ne se laisse pas faire. Il a mille et une idée pour que la manche rapporte un petit peu plus que quelques pièces. Avec lui et Moussa, à tous les trois, ils sont plus forts, moins seuls. « On sait se divertir avec Tamás, et tout n’est pas gris dans nos journées »
Mais la réalité de la rue se rappelle très vite à eux : le froid et la faim, la lutte, les choix incessants. Le narrateur refait sans cesse le chemin qui l’a conduit à la rue. Son frère Jonas est extrêmement présent tout au long des pages, ce grand frère qu’il voyait déjà chef pâtissier, dont il était si fier et qu’il a vu s’évaporer dans l’alcool, dans la drogue. Une mère aimante qui a tout fait pour protéger son plus jeune fils mais qui n’a pu empêcher la déroute de l’aîné plongeant toute la famille dans le néant.
La rencontre avec Élise, elle-aussi à la rue, qui s’habille, se déguise en homme pour pouvoir dormir en paix, loin des loups, transforme son quotidien. Non qu’il devienne plus facile mais Élise écrit des poèmes sur ce qu’on voit du trottoir. Chaque jour, elle lui en lit un et c’est son événement ! Un souffle qui lui donne envie de changer les choses, de changer leur monde…
Agnès Maillard Romazzotti
Éditions Gallimard – 2024 – 128 p.