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La machine à exclure
- Politique, Emploi-Chômage
Description
Les faux-semblants du retour à l’emploi
L’auteur, chercheur au Centre de recherches politiques de la Sorbonne, brosse ici un examen proprement clinique des données et solutions successives du problème de l’employabilité des personnes en difficulté sociale – allocataires, Rmistes, etc. – à partir d’enquêtes départementales, notamment en Ile-de-France. Il en dégage une tendance vers un libéralisme de marché concurrentiel accru et une traque des assistés.
D’abord, se confirme l’hypothèse que plus le chômage dure, moins l’employabilité est assurée. De plus, les nouvelles lois de 2006 (Borloo) ne différencient plus les catégories des sans-travail : depuis les motivés, qui sont recherchés mais souvent découragés par la multiplicité des formations sans issues, jusqu’aux déficients culturels et handicapés, mal pris en compte. Ces lois relèvent plus des contraintes économiques, néolibérales que de la finalité sociale et démocratique de l’égalité des droits et elles mettent paradoxalement plus en cause la responsabilité des allocataires.
Les travailleurs sociaux et les agents de l’ANPE, en sous-effectifs, sont contraints aussi à des tâches annexes : entretiens fréquents, convocations qu’ils doivent traitées d’une manière expéditive, plus en tant que contrôleurs de fraude (seulement 1% aux CAF) qu’accompagnateurs patients et attentifs à tous les facteurs de difficultés d’emploi, définis comme rédhibitoires par les responsables d’insertion, comme l’alcoolisme, le manque de logement, etc.
En somme, les autorités politiques et économiques ont tendance à substituer au droit de vivre dignement “un processus d’assistantialisation“, au nom de la valorisation du travail, jouant sur les préjugés ambiants contre les bénéficiaires d’allocations et sur le ressentiment des travailleurs pauvres ou smicards envers les assistés. Elles recourent même à une pédagogie mobilisant les égoïsmes sociaux. Ces vues sont bien résumées dans la conclusion : “La seule chose qui compte pour la gouvernementalité néolibérale est d’amener les acteurs sociaux à jouer le jeu de la concurrence et de réussir à aménager pour cela des circuits fluidifiant les passages de l’activité, imposée si nécessaire, à la privation d’activité contrainte, et vice versa”.
Cette analyse manifeste un esprit polémique peut-être un peu trop vif qui risque d’indisposer ceux auxquels elle devrait s’adresser.
Clémence Boyer
Éditions La Découverte – Alternatives sociales – 2006 – 265 p.