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Journal d'ATD Quart Monde n° Avr.2013

L’université populaire Quart Monde

Éditorial du journal

Cité de la Villette à Paris, Forum « agir contre la misère », 1er mars 2013. À la table, deux travailleurs entre emploi et précarité, un ancien patron de grande entreprise et un responsable syndical. Dans la salle, 300 personnes. Les deux travailleurs témoignent.

« Je suis cariste, mais je ne trouve que par interim. Quand je demande à une entreprise si elle peut m’embaucher en CDI, on me dit qu’il faut Bac + 2, mais je n’ai pas le Bac. Pourquoi ? Je connais le métier, je travaille depuis 17 ans ! On ne regarde que les diplômes et pas ce que les gens savent faire. Les syndicats ne nous connaissent pas. En fait, on ne nous fait pas confiance. »
« Dans les emplois de nettoyage, on est tout seul, on ne se rencontre pas entre travailleurs. Et avec les autres employés, entre l’aspirateur et nous, ils regardent plutôt l’aspirateur. Trop souvent, on nous met en concurrence parce qu’on est payé à la chambre nettoyée et il faut en faire le plus possible. Le syndicat nous aide à nous rencontrer. »

La salle ajoute d’autres exemples. L’ancien chef d’entreprise et président de la FNARS (Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale), Louis Gallois, et Thierry Lepaon, secrétaire général de la CGT (Confédération Générale du Travail) , réagissent à chaque propos et confirment : sur 21 millions d’embauches annuelles, 14 le sont pour des durées de moins d’un mois. Ils ajoutent honnêtement qu’ils connaissent peu ces réalités et apprennent beaucoup ce soir. Et pour agir, il faut comprendre. « Tout le monde doit apporter sa connaissance, il faut comprendre ces réalités avec tous les points de vue pas seulement avec le point de vue des experts en économie », dit l’un. « Si on se disait ces choses plus souvent, on trouverait tous du courage pour lutter contre la précarité », ajoute l’autre.

Au fil des échanges, des accords émergent : le travail doit sortir de l’isolement. Il faut pouvoir faire reconnaître et améliorer ses compétences. L’entreprise doit permettre de coopérer au lieu de mettre ses employés en concurrence les uns contre les autres.

Au fond, qu’il y ait une compétition entre les entreprises est peut être inévitable, comme entre des équipes de foot. Mais si, dans une équipe de foot, il y a concurrence entre les joueurs, celle-ci n’a plus aucune chance de gagner. Peut-on faire que notre économie cesse de perdre de l’emploi ? Ne serait-ce pas en apprenant à coopérer, inventer, gagner ensemble avec les intelligences de tous et pas seulement l’intelligence de quelques-uns ?

Un des travailleurs conclut : « Demain, vous allez croiser un voisin privé d’emploi ou quelqu’un qui nettoie dans votre entreprise, qui est seul, invisible. Adressez-lui la parole. Cela changera beaucoup pour lui. » Et, après un silence : « Merci d’être venus, au moins, ce soir, j’ai été écouté. »

Bruno Tardieu, Délégué national d’ATD Quart Monde France

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