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Comment concilier lutte contre le chômage et transition écologique : Le débat est ouvert

Le 26 septembre, le festival Alternatiba a organisé à Paris un débat sur le thème « La transition écologique, une chance pour le climat, une chance pour l’emploi ». Le directeur de TAE (Travailler et Apprendre Ensemble), l’entreprise solidaire d’ATD Quart Monde, a expliqué que la lutte contre le chômage pouvait se concilier avec la transition écologique.

 

« Quand une entreprise ferme et que cela permet un mieux environnemental, cela peut être une catastrophe pour les salariés. Mais comment leur expliquer ? » : Thierry Dedieu, secrétaire confédéral à la CFDT, a résumé au mieux le dilemme auquel les syndicats font face aujourd’hui : comment concilier, sans coût social, lutte contre le chômage et lutte contre le dérèglement climatique ?
Pour préserver l’avenir de la planète, il faut limiter le réchauffement, ce qui suppose de recourir à des énergies propres et de supprimer des activités polluantes. Or cela peut provoquer des fermetures d’usines et des cessations d’activités, avec le risque d’accroître encore le chômage.

« Pas d’emploi sur une planète morte »

Outre Thierry Dedieu, quatre intervenants siégeaient à la tribune : Bruno Lamour, président du collectif Roosevelt (1), qui animait le débat, Dominique Méda, philosophe et sociologue spécialiste du travail, Didier Aubé, secrétaire national de l’Union Syndicale Solidaires, et Didier Goubert, le directeur de TAE.
Le débat se tenait à la Bourse du Travail, à deux pas de la place de la République où Alternatiba – un mouvement qui appelle à des solutions alternatives pour sauver une planète menacée – qui avait planté ses tentes durant tout le week-end.
« Il n’y aura pas d’emploi sur une planète morte, a enchaîné Thierry Dedieu, il faut trouver un autre mode développement ». Le syndicaliste s’est ensuite interrogé sur « le degré de conscientisation du citoyen» face à l’urgence climatique : « Le citoyen travailleur ne voit pas clair, il est dans une situation de résistance ».

Une coalition de la société civile pour le climat

A la tribune, les débatteurs se sont félicités des liens qui se sont noués sur ce sujet, au-delà des rivalités syndicales et des différences de points de vue syndicats-ONG. Plusieurs organisations – CGT, CFDT, Sud et FSU – ont rejoint la coalition Climat 21 aux côtés d’une centaine d’associations et mouvements, dont ATD Quart Monde.
La coalition appelle à une marche mondiale le 29 novembre, à la veille de l’ouverture de la grande conférence sur le climat à Paris, la COP 21 (30 novembre-11 décembre). Derrière cette coalition, l’idée est que l’on doit en même temps résoudre la crise économique et sociale, et celle du climat.

« Personne n’est inemployable »

Devant la petite centaine de personnes, très attentives, réunies dans la salle Jean Jaurès de la Bourse du travail, Didier Goubert a expliqué les principes qui guident l’action d’ATD Quart Monde dans la lutte contre le chômage.
« Il est éthiquement inadmissible de laisser des personnes sur le bord de la route, a-t-il déclaré, le chômage est la première source de grande exclusion. Il envoie un signal terrible aux personnes touchées – du mépris, sur le mode « on n’a pas besoin de vous ».
ATD Quart Monde a fait la preuve que «personne n’est inemployable», a poursuivi Didier Goubert. Il a cité l’exemple de TAE, l’entreprise solidaire qui recycle de vieux ordinateurs et emploie 20 personnes, pour moitié issues de la grande exclusion, pour l’autre moitié « des inclus » : « elles travaillent ensemble et elles produisent ».

Des emplois de la transition écologique

Le directeur de TAE a ensuite évoqué l’expérimentation portée par ATD Quart Monde, baptisée Territoires zéro chômeur de longue durée – la création d’emplois sur les territoires, en partie financés par le coût du traitement du chômage.
Il a souligné qu’en réalité, il y avait du travail et des besoins sociaux non satisfaits. Parmi eux, un certain nombre sont liés à la transition écologique – isolation des maisons, agriculture biologique à un niveau local, tri de récoltes pour le compost, déboisement et sylviculture, etc.
Les échanges avec la salle ont notamment porté sur la possibilité d’une semaine de 32 heures et sur la création d’une allocation universelle .A la tribune, manifestement tout le monde n’était pas sur la même longueur d’ondes. Bruno Lamour a conclu sur une note harmonieuse, se félicitant d’« un embryon de début de dialogue entre nous » sur la question climatique. Et appelant à poursuivre le débat.
Véronique Soulé

(1) auteur de « Stop au dérèglement climatique », Les éditions de l’Atelier, 2015, 110 pages, 6 euros.