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Courrier des lecteurs : « Prendre confiance en moi »

Le Journal d’ATD Quart Monde reçoit chaque mois plusieurs courriers de lecteurs. Nous publions ici la lettre de Sylvie, qui nous raconte son parcours.

Durant l’été 1985, à l’âge de 6 ans, après 5 ans de famille d’accueil et un an de foyer à Nieul, ma mère a enfin réussi à me récupérer. Il s’en est suivi une entrée en CP dans une nouvelle école avec une nouvelle famille et, en plus, un petit frère, pas toujours facile pour moi à ce moment-là. Ma mère travaillait dans une usine de porcelaine avec le père de mon frère et, pour cette raison, il a fallu que je grandisse très vite.

C’est là qu’ATD Quart Monde entre en scène. Grâce aux Bibliothèques de rue, je pouvais m’échapper tous les mercredis de mon quotidien. C’est d’ailleurs l’animatrice de cet atelier, Mme Marie-Alex Poussin, qui à l’époque avait remarqué mon cahier de poésie et expliqué l’intérêt d’écrire un poème pour la pose de la plaque du Trocadéro le 17 octobre 1987. Me voilà donc partie, âgée de 8 ans, à Paris pour lire mon poème. Ce voyage avait été assez impressionnant pour moi, pour plusieurs raisons : je n’avais jamais fait un si long voyage ; j’allais voir la Capitale pour la première fois ; je devais lire mon poème devant des milliers de personnes.

J’avais très peur, mais là, encore une fois, les bénévoles d’ATD ont encore été là pour me rassurer et m’encourager. Finalement, j’ai exécuté ma tâche sans aucun problème.

Par la suite, ma mère et mon beau-père ont été licenciés, une petite sœur est arrivée et tout s’est compliqué ! Le manque d’argent et un beau-père alcoolique qui devenait de plus en plus violent ont fini d’arranger le tableau. C’est à cette période que j’ai pu intégrer l’atelier de menuiserie d’un bénévole, M. Paul Mandonnaud. Celui-là n’avait pas pour but de faire de nous des futurs menuisiers, mais surtout de nous apprendre un certain respect des matériaux et des gens et de nous permettre de nous évader de notre quotidien pendant quelques heures.

Quand mon dernier petit frère est arrivé, ma mère et mon beau-père se sont séparés. Seule avec quatre enfants, on a eu des mois avec 2000 francs par mois. Tous ces soucis pour une enfant de 12 ans ont fini par me déclencher des crises de tétanie nerveuse. Ma mère, un peu dépassée par la situation à l’époque, faisait ce qu’elle pouvait, mais, certains mois, sans les membres de l’association ATD Quart Monde pour la conseiller sur ses différents droits, nous aurions eu à peine de quoi manger.

C’est ainsi que s’est déroulée mon enfance, pas toujours facile ni toujours agréable, mais je ne regrette rien car, même les jours où, trop occupée, ma mère n’avait pas de temps pour moi, je savais qu’un de ces bénévoles serait là pour moi. Ils m’ont vu pleurer, crier, être dans tous mes états, mais ils étaient là aussi pour partager avec moi tous mes petits bonheurs, me valoriser et surtout me permettre de prendre confiance en moi.

Avec le temps, le travail et les enfants, je me suis peu à peu éloignée de toutes ces personnes, mais je ne les ai jamais oubliées. Encore un grand merci à elles et à toutes les autres qui, dans l’ombre, prennent un peu de leur temps pour faire un sourire ou écouter une personne. Merci à tous. Sylvie

Pour écrire au Journal d’ATD Quart Monde : lejournal@atd-quartmonde.org ou ATD Quart Monde, 63, rue Beaumarchais, 93100 Montreuil

Cet article est extrait du Journal d’ATD Quart Monde de janvier 2020.