Entrez votre recherche ci-dessous :

Territoires zéro chômeur de longue durée : Carton plein pour La Fabrique de l’emploi

La Fabrique de l’emploi est l’entreprise à but d’emploi (EBE) créée à Tourcoing et à Loos (Nord) dans le cadre de l’expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée. Constituée en juin 2017, elle s’est lancée dans le projet aux côtés de 9 autres EBE à travers la France, recrute  des personnes qui étaient éloignées de l’emploi et voit l’avenir avec un certain optimisme. Reportage.

Les gâteaux maison ont été vite engloutis. L’équipe de la Fabrique de l’emploi, qui avait préparé la table d’accueil, n’avait pourtant pas lésiné sur la quantité. Mais personne n’avait prévu l’affluence à la journée Portes Ouvertes de l’entreprise à but d’emploi (EBE) de la Métropole européenne de Lille.  » Nous avions une quinzaine d’inscrits », indique Ghislain de Muynck, le directeur, estomaqué devant le succès comme le reste de l’équipe.

Molenbeek

Très vite, les participants – autour de 70 – vont se disperser. Il faut dire que l’on est à l’étroit dans le petit local situé au pied d’un immeuble du quartier des Oliveaux de Loos, déjà exigu pour  » l’équipe support  » de la Fabrique de l’emploi. Un groupe part découvrir l’activité maraîchage, un autre la recyclerie.

Ghislain de Muynck présentant la Fabrique de l’emploi et ses activités. @CM

La plupart des participants sont des professionnels de l’emploi et de l’insertion, des responsables municipaux, des militants associatifs… Séduits par le projet, ils veulent en savoir plus. Deux personnes ont fait le voyage depuis Alès, dans le Gard – la ville est tentée par l’expérience. Une équipe d’ATD Quart Monde est venue de Molenbeek, en Belgique.

La Fabrique de l’emploi a été créée le 26 juin 2017. Fin janvier 2018, elle avait recruté 68 personnes en CDI dont quelques-unes ont choisi un temps partiel. Le 25 janvier, l’équipe participait au Laboratoire des travaux utiles, une manifestation organisée dans les dix EBE pour montrer leurs activités.

Paniers

Sur le terrain maraîcher – 4 100 mètres carrés prêtés par la mairie de Loos avec une serre -, des salariés en gilet fluo nous attendent. Certains avaient d’autres métiers mais ils étaient volontaires pour rejoindre cette activité dans l’EBE. Tous habitent le quartier, condition pour rejoindre le projet, et étaient sans emploi depuis au moins un an.

Sur le terrain de maraîchage, on aménage une serre. @CM

Comme il n’y a pas de chef, expliquent-ils, ils ont décidé ensemble de ce qu’ils allaient faire : produire des légumes qu’ils vendront à l’épicerie solidaire de l’EBE, à des restaurants – certains étant déjà intéressés – et à des habitants sous la forme de paniers à des prix modiques. «  A Loos il n’y a pas ces paniers, on ne concurrence donc personne « , soulignent-ils.

Joël, 27 ans et père de trois enfants, travaillait dans les jardins. C’est lui qui, durant une semaine, a débroussaillé le terrain. Avec un CDI, il revit :  » On me donnerait 6 000 euros de chômage par mois, je resterais pas chez moi. On est 13 frères et soeurs, on est tous comme ça, on veut bosser.  »

Epicerie

Etape suivante : l’épicerie solidaire qui s’apprête à ouvrir. La Fabrique de l’emploi a un partenariat avec La Pioche, l’épicerie solidaire de Haubourdin, non loin. Les salariés y vont deux jours par semaine pour se former. Les autres jours, ils montent les rayons, préparent les cartes d’adhérents…

Tatiana présente l’épicerie solidaire de Loos. @CM

Tatiana, 34 ans, a travaillé cinq ans à Carrefour Market. «  Avec les horaires, ça n’allait pas. Seule avec trois enfants, je ne pensais pas retrouver un CDI. Là, j’ai même pu choisir mes horaires pour coller à ceux de l’école. »

A Tourcoing, l’autre site de la Fabrique de l’emploi, le garage solidaire doit ouvrir courant mars. Les locaux ont été trouvés mais il faut finir de les installer. Une recyclerie de métaux y fonctionne déjà.

Polyvalence

Éric, 47 ans, au chômage depuis la fin 2014, vivait avec l’Allocation de solidarité spécifique. « Lorsque Pôle emploi m’a envoyé des papiers pour me parler du projet, fin 2016, j’y ai cru. Je suis allé à toutes les réunions. Bien sûr, je me posais des questions : on va nous donner un CDI sans nous faire faire de CDD ? Mais j’ai toujours pensé que le travail, il existait sauf qu’il était caché ».

Eric dans le garage solidaire où il recycle des métaux. @VS

Aujourd’hui salarié à la Fabrique de l’emploi, Éric travaille au recyclage des métaux dans le garage :  » Ça me va mais je vais tourner parce que moi, ce que j’aime, c’est la polyvalence.  »

 » Un CDI, ça change la vie, poursuit-il, Quand je me lève le matin, je sais pourquoi. J’ai la banane. Je travaille, je touche de l’argent. Quand je vivais avec les Assedic, j’en avais assez. Nous les gens, on veut s’en sortir !« 

Véronique Soulé

Photo: les salariés de la Fabrique de l’emploi présentant l’activité maraîchage sur le terrain de Loos. ©VS