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À l’atelier « Destins cuivrés », la création est « un support de rencontres »

L’atelier « Destins cuivrés » permet à des jeunes ni en emploi ni en formation de créer de leurs mains, à travers le travail artisanal du cuivre.

Cisailles à la main, Béatrice tire la langue en découpant une étoile dans un bout de tôle de cuivre. À côté d’elle, Jérémy et Manon liment un petit bouclier en suivant les instructions de Martin, volontaire permanent d’ATD Quart Monde. Ils ont une vingtaine d’années et ont d’abord regardé d’un œil curieux cet atelier itinérant s’installer au bord de la route, à un arrêt de bus du village de Fraisans, à mi-chemin entre Dole et Besançon.

Depuis le mois de janvier, Martin et Nicolas, chaudronnier de formation, viennent un vendredi sur deux, avec leur banderole « Destins cuivrés », une table et des outils. Les jeunes tournent autour, puis s’approchent doucement, souvent en groupes.

L’idée de cet atelier est venue de Nicolas. En dehors de son activité professionnelle, il travaille le cuivre depuis près de 20 ans pour en faire des objets d’art. Il a souhaité partager sa passion avec le groupe jeunes d’ATD Quart Monde, à Dole, puis au Festival des savoirs et des arts, avant de proposer l’atelier itinérant. Lui-même a grandi dans un milieu rural, comme à Fraisans, où « il n’y avait rien à faire, à part du foot ». Il veut aujourd’hui « faire découvrir une matière », le cuivre, mais surtout redorer le blason des métiers manuels, « trop souvent dénigrés ». « Quand j’étais jeune, j’ai eu une mauvaise expérience avec l’école. Je me suis orienté vers un métier manuel et, pour les autres, j’étais donc un moins que rien. Malheureusement pour les jeunes, le discours n’a pas trop évolué aujourd’hui. Je veux défendre mon métier, en faisant des objets agréables à regarder, à toucher. Je veux leur montrer qu’on est heureux à la fin de la journée, même si on est sale », raconte-t-il.

S’exprimer avec un outil

En 20 minutes, Béatrice a terminé son étoile en cuivre et la montre avec fierté à ses petites sœurs. Depuis qu’elle a découvert cet atelier, la jeune femme, venue du village voisin de Dampierre, a également rejoint le groupe jeunes d’ATD Quart Monde. « La création est un support de rencontres. L’objectif est de rejoindre les jeunes que l’on ne connaît pas encore, de leur redonner confiance en eux, l’envie d’apprendre quelque chose », souligne Martin.

À côté de lui, Jérémy, David et Manon, venus avec leur éducateur, se félicitent les uns les autres et sourient, en regardant leurs réalisations. « Quand on a fini une pièce, même si on sait qu’elle a des défauts, le fait de l’avoir créée rend heureux. Cet atelier permet de commencer un lien, par une approche simple. On peut s’exprimer, sans dire de mot, juste avec un outil. C’est aussi un langage, le travail », précise Nicolas. Il rêve de voir se multiplier ce type d’ateliers et « des endroits ouverts à tous avec différents corps de métier, des menuisiers, ébénistes, tailleurs de pierre, charpentiers, plombiers… Il faut montrer que ce sont de vrais métiers, où l’on s’épanouit pleinement ». En fin d’après-midi, tous les participants repartent tranquillement, leur pièce de cuivre dans la poche et, dans la tête, peut-être l’idée qu’ils peuvent avoir confiance dans leurs capacités.

Cet article fait partie du Journal d’ATD Quart Monde de mai 2022.

Photo : Atelier « Destins cuivrés » à Fraisans le 18 mars à Fraisans. © Denis Gendre