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Une professionnelle de l’action sociale rencontre ATD Quart Monde

Sabine C. est animatrice et travailleuse sociale dans un centre d’accueil de jour pour des personnes sans-abri à Lyon. Depuis 4 ans, elle accompagne la présence des membres d’ATD Quart Monde qui viennent dans ce lieu à la rencontre des usagers et animent des préparations d’Université Populaire Quart Monde. Sabine partage son expérience de la rencontre du mouvement ATD Quart Monde.

Témoignage extrait de son intervention orale le 28 mai lors de la présentation publique du rapport régional.

« Dans un accueil de jour on reçoit des personnes en grave difficultés sociales, des personnes qui arrivent parfois de la rue, qui viennent chercher un abri en journée, des « services de première nécessité » (se laver, manger, voir une infirmière, recevoir son courrier …), de l’aide et de l’accompagnement social. C’est là qu’on reçoit les personnes et qu’on fait avec eux.
L’accompagnement pour un travailleur social dans un centre d’accueil de jour, c’est travailler avec les personnes en face à face avec un assistant social, travailler sur les problématiques d’échec, travailler à une reprise de confiance, travailler un projet pour aider la personne à dépasser certains obstacles, retrouver un logement, reprendre contact avec la famille…

C’est dans ce cadre que le partenariat avec ATD Quart Monde s’est mis en place avec les Universités Populaires Quart Monde. Au départ, c’est un peu le fruit d’un hasard, d’une rencontre avec Guillaume (volontaire d’ATD Quart Monde) qui cherchait un lieu pour accueillir le groupe d’Université Populaire.

Les premières années n’ont pas été sans difficulté et sans conflit ou contradiction avec l’équipe des travailleurs sociaux, car on s’est très vite aperçu que l’accompagnement vu par les membres d’ATD Quart Monde n’était pas le même que celui qu’on pratiquait en tant que travailleurs sociaux dans un accueil de jour. C’était pas le même, car a l’accueil de jour on travaille sur un accompagnement vertical avec un travailleur social qui sait (si ce n’est ce qui est mieux pour la personne (car on est déjà depuis longtemps sur l’idée de travailler le projet des personnes), en tout cas sait comment arriver à aboutir ce projet) donc on renvoie à chaque fois à la personne sa condition d’échec. Il a échoué et nous on peut l’aider à faire aboutir le projet que l’on travaille ensemble.

La pratique d’ATD Quart monde que j’ai pu percevoir, c’est au contraire une relation équitable d’accompagnement. Il n’y a pas celui sait celui qui ne sait pas, il y a peut être celui qui est un peu plus en difficulté, et celui qui l’est un peu moins, mais leurs expériences valent autant l’une que l’autre et donc la personne qui est en difficulté et en besoin d’aide est là en position de ne pas montrer ses échecs mais de montrer ce qu’il peut mettre en œuvre pour réussir, et de dire son expertise.

Ça a été l’objet du débat, ça a provoqué des situations qui n’étaient pas comprises de la part des travailleurs sociaux de l’accueil de jour, il y a eu des recadrages, des explications, on s’est partagé le terrain. On a eu peur qu’ATD Quart Monde prenne un peu la place des travailleurs sociaux…

Mais en tout cas ce qui est intéressant c’est que ces situations ont obligé l’équipe des travailleurs sociaux à se questionner sur ses pratiques. Moi en particulier je me suis sentie assez bouleversée dans mes questionnements, ainsi que dans mes pratiques. Je n’en avais pas forcément conscience auparavant. Et professionnellement ça m’a aidé à prendre une décision intéressante : je pense depuis quelques mois me positionner réellement en militante des lois qu’on devrait mettre en place depuis longtemps, autour de la loi de 1998 de lutte contre les exclusions et, entre autre au niveau de l’accueil de jour, me recentrer sur la mise en place des Conseils d’Usagers, des Conseils de Vie Sociale ;

Ces Conseils d’Usagers existent depuis 2005 mais en fait sans jamais y mettre de sens. Je pense que ce que m’a engagé indirectement à faire ATD QM, c’est à amener mon institution à travailler la question des Conseils d’Usagers en y mettant du sens. Ils s’engagent déjà beaucoup car l’année dernière ils ont édité un guide de mise en place des conseils d’usager, mais maintenant la difficulté c’est d’obliger chacun à respecter les indications de ce guide. C’est difficile d’écouter les gens, leur donner la parole pas juste pour se donner bonne conscience mais vraiment pour utiliser leur parole comme matière à travailler parce que c’est de l’expérience, ils savent souvent (pas toujours) mieux que nous ce qui peut les aider. C’est également difficile pour l’institution car on travaille sur des temps différents. Les personnes qu’on accueille sont souvent dans l’immédiat, des situations d’urgence. Nous on est sur des projets à un an, trois ans ou cinq ans ; et il faut concilier ces temps différents »