Une société autrement (édito du Journal d’ATD Quart Monde de février 2017)

Le 14 février, nous célébrons au Conseil économique, social et environnemental les trente ans du rapport Wresinski. En affirmant que la misère est une violation des droits de l’homme, Joseph Wresinski a fait de la lutte contre la grande pauvreté un enjeu fondamental de nos démocraties.

Une loi d’orientation ambitieuse fut ensuite votée en juillet 1998. Dans son article premier est inscrit : « La lutte contre les exclusions est un impératif national fondé sur l’égale dignité de tous les êtres humains et une priorité de l’ensemble des politiques publiques de la nation ».

Qu’en est-il aujourd’hui ? Des adultes et des familles sont jetés à la rue sans autre option que de s’en remettre au dispositif saturé du 115 dans l’espoir d’un hébergement hypothétique. Des jeunes sans qualification sont enserrés dans des dispositifs qui ne leur ouvrent aucune perspective vers un emploi pérenne. Le sentiment d’abandon et de rejet de ceux vivant des minima sociaux est renforcé par une pauvrophobie ambiante. Le renoncement au RSA et à tous ces dispositifs sans perspective d’accès aux droits atteint des records, signe d’une résistance à des politiques à courte vue sans ambition.

« Notre parole est mise en doute. On est tout le temps dans l’angoisse de ce que sera demain, jamais de plaisir. » Fatiha nous rappelle l’enjeu de l’égale dignité : « Sommes-nous tous des êtres humains ? » ou : « Peut-on trouver une manière de vivre ensemble où chacun peut apporter sa pierre, vivre, rêver et avoir des projets ? » Elle vit au RSA mais ne renonce pas à son rêve d’un autre avenir pour ses enfants. Militante d’ATD, elle anime un groupe local, se mobilise pour un meilleur accueil des migrants, redonne espoir à des personnes âgées isolées. Elle met en œuvre des solutions pour une société autrement.

Christophe Geroudet, délégué national d’ATD Quart Monde