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Les visages d’ATD Quart Monde – Thibault et Elsa : « faire le pont entre deux mondes »

Elsa et Thibault Dauchet ont choisi, depuis plus d’une dizaine d’années, de « lier leurs vies durablement aux combats d’ATD Quart Monde » en devenant volontaires permanents.

De Toulouse à Madrid, en passant par Noisy-le-Grand et Bruxelles. Elsa et Thibault n’imaginaient pas, il y a 16 ans, que leur engagement avec ATD Quart Monde les conduirait à voyager autant. En 2003, Elsa découvre le Mouvement par hasard.  « J’étudiais à Toulouse dans le domaine des métiers du livre. Mon projet était de faire un stage dans la bibliothèque d’une prison, mais il n’y avait plus de place. L’une de mes profs m’a proposé de le faire dans une Bibliothèque de rue. » Petit à petit, elle découvre son ignorance de « tout un pan de la société ».  « Je ne m’étais jamais questionnée plus que ça sur la pauvreté et sur les conséquences que cela a sur les enfants et les familles. »

Interpellé par son engagement, son compagnon, Thibault, décide lui de faire un stage aux Éditions Quart Monde. « Je cherchais à donner du sens à ce que j’allais faire après mes études. Dans les autres associations ou syndicats, je ne trouvais pas ma place, j’avais du mal à savoir pourquoi choisir une cause plutôt qu’une autre », explique Thibault. « J’ai compris que régler la question de la misère ne permet pas seulement de changer le sort des personnes qui vivent la pauvreté, mais peut améliorer la société pour tous. Mais cela restait encore assez abstrait pour moi. »

Voir les injustices du quotidien

Elsa découvre alors qu’ATD Quart Monde propose le volontariat. Ils décident, ensemble, de sauter le pas. « Ce qui m’a fait passer de l’alliance au volontariat, c’était ce sentiment de ne pas avoir assez de temps pour être avec les familles. J’aimais penser qu’en vivant avec les familles, en découvrant leurs réalités, ensemble, on pouvait changer les choses », souligne Elsa.

Leur première mission est au Centre de promotion familiale de Noisy-le-Grand, en Seine-Saint-Denis. Pendant trois ans, ils habitent dans la cité : Thibault rejoint les adolescents, Elsa va à la rencontre de familles, tente de faire le lien avec le reste du quartier. « Nous avons pu mieux comprendre le vécu des familles, à travers les naissances, les mariages, mais aussi un incendie, les maladies, voir que les gens meurent plus vite qu’ailleurs, voir une mère à qui on refuse des médicaments quand ses enfants sont malades… Cela m’a marqué de voir réellement toutes ces injustices du quotidien », se rappelle Thibault. Pour le couple, c’est une expérience forte et ils comprennent que leurs vies sont désormais durablement liées aux combats d’ATD Quart Monde.

Faire le pas de plus

Avec leurs deux enfants, ils partent alors pour la Belgique, où ils restent huit ans. « Nous ne cherchions pas du tout à aller à l’étranger, mais nous avons senti qu’on nous faisait confiance. C’est ça le volontariat, être soutenu par les autres pour oser faire le pas de plus. » À Bruxelles, Elsa est dans l’équipe d’animation de l’Université populaire Quart Monde. Une mission « très riche » qui lui permet notamment de mieux comprendre « l’importance de ce lieu de formation que constitue l’Université populaire, pour pouvoir ensuite sortir de l’isolement, se rendre compte que ce qu’on dit, ça compte et qu’on peut se défendre quand nos droits ne sont pas respectés« .

Elle participe également au Croisement des savoirs et des pratiques et à un projet pour une école de la réussite pour tous, avec des professionnels de l’école, des parents et des adolescents pour la plupart en décrochage scolaire. « Cela avait tout son sens dans mon engagement. Pour moi, les volontaires sont parfois un peu le pont entre deux mondes, qui ne se connaissent pas et qui ont des compréhensions différentes d’un même problème. »

S’inscrire dans l’histoire d’un combat

Thibault travaille d’abord dans le secrétariat de l’équipe nationale belge, puis en 2015 il intègre cette équipe nationale. « Je ne m’attendais pas à ça en rentrant dans le volontariat. Mais quand on était dans la cité, à Noisy-le-Grand, j’ai senti qu’on était libre d’aller très loin dans la relation avec les personnes, parce qu’il y avait, derrière nous, un certain nombre de sécurités qui étaient portées par d’autres dans l’association. J’aime ce côté du volontariat et je trouvais important de pouvoir rendre la pareille à d’autres volontaires. » Après l’engagement ancré dans le local, il comprend mieux la globalité d’ATD Quart Monde, « ce que cela veut dire de s’inscrire dans l’histoire d’un combat dans un pays, vouloir transmettre à d’autres un Mouvement en lien avec les défis de la société, qui a les moyens de ses ambitions. C’est un chouette défi ».

Depuis un an, ils sont installés à Madrid avec leur quatre enfants. Une année de découverte, durant laquelle ils ont pris des cours de langue tous les matins et se sont impliqués dans une Bibliothèque de rue et dans des actions avec les adolescents. « Parfois, j’ai l’impression que cela veut dire repartir un peu de zéro. Mais cela a aussi du sens. Ce changement me permet de renouveler mon engagement, d’apporter tout ce que j’ai appris en Belgique et de le transmettre, de créer des liens entre les pays dans lesquels j’ai été. C’est une ouverture vers ailleurs », conclut Elsa. Julie Clair-Robelet

Pour s’informer et devenir volontaire : https://www.atd-quartmonde.fr/sengager/devenez-volontaire/

Cet article est extrait du Journal d’ATD Quart Monde de décembre 2019.

 

Photo : Portrait de Thibault et Elsa à Méry-sur-Oise. © Carmen Martos, ATD Quart Monde