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Les visages d’ATD Quart Monde : Didier Auger, « un combat pour les droits humains »

Allié d’ATD Quart Monde à Rennes depuis six ans, Didier Auger fait aujourd’hui partie de l’équipe d’animation locale.

« Je veille sur la Maison Quart Monde de Rennes en faisant du bricolage », affirme d’abord Didier Auger, un peu gêné. En le questionnant, on voit que son engagement est cependant bien plus large que cela et qu’il connaît le Mouvement depuis très longtemps. Cet ancien professeur et directeur d’une Segpa (Section d’enseignement général et professionnel adapté), aujourd’hui âgé de 63 ans, a croisé la route d’ATD Quart Monde pour la première fois dans les années 1980, lors d’une table-ronde sur le parcours des jeunes scolarisés dans les collèges et les lycées. Il se retrouve en face de parents d’élèves évoquant leurs combats du quotidien. « Je savais qu’ils vivaient difficilement, mais j’ai alors réalisé ce que cela signifiait concrètement. »

« Aspiré par ATD Quart Monde »

Didier attend cependant plus de 30 ans pour frapper à la porte d’ATD Quart Monde à Rennes. En 2011, son épouse, Thérèse, décide de s’engager comme alliée, mais il ne comprend pas vraiment en quoi consiste l’action du Mouvement, « cela avait l’air complexe ». Trois ans plus tard, il prend sa retraite et veut « profiter de ce moment de la vie où l’on a le luxe de gérer son temps et de réfléchir à ce qu’on n’a pas vraiment fait, mais qu’on aurait aimé faire ». Il devient écrivain public en prison et vient aider à la Maison Quart Monde, qui est alors en plein déménagement. Il donne un coup de main pour quelques travaux, puis, petit à petit, tisse des liens avec des membres du Mouvement.

Lentement, il a l’impression d’être « aspiré » par ATD Quart Monde, mais ne souhaite pas s’engager de la même manière que Thérèse. « J’ai participé à des préparations d’Universités populaires Quart Monde dans un groupe d’alliés et cela m’a un peu ouvert les yeux. C’était étonnant cette liberté de parole. J’étais aussi impressionné, lors des plénières, par les prises de parole des militants et par la façon dont ils parvenaient à se mettre debout. » Venu au départ pour faire du bricolage, il se retrouve peu à peu engagé dans la préparation de la Journée mondiale du refus de la misère, le 17 octobre, mais aussi dans le soutien de la Dynamique jeunesse d’ATD Quart Monde et intervient dans des écoles pour faire connaître le Mouvement.

Il se lance aussi dans l’organisation de Festivals des savoirs et des arts dans les quartiers du Blosne et de Maurepas. « Animer une dynamique pour construire, en équipe, un festival, c’est complexe et hyper intéressant. Puis aller chercher des habitants qui, d’habitude, ne sortent pas de leur logement et les voir découvrir qu’ils ont aussi des talents et qu’ils peuvent les partager avec leurs voisins, c’est super. »

Sortir de l’entre-soi

Depuis deux ans, il fait partie de l’équipe d’animation locale du Pays de Rennes, avec une volontaire permanente, un militant Quart Monde et quatre alliés. Son engagement est désormais davantage tourné vers le cheminement avec les familles, notamment celles qui subissent le placement de leurs enfants. Il découvre alors une autre facette du Mouvement. « Quand on accompagne des personnes en situation de pauvreté dans les institutions publiques, à leur demande, c’est plus qu’un engagement ponctuel. On découvre des mondes parallèles, on sort de l’entre-soi et on se rend compte qu’on a eu une vie confortable, même si on a pu connaître parfois des difficultés. En cheminant avec ces familles, on passe en quelque sorte de l’autre côté de la barrière et on s’aperçoit de la pression qu’elles subissent. C’est un combat du quotidien et nous devons être présents à la demande des personnes qui ont besoin d’être rassurées et peut-être de lever un peu la tête, parce qu’on peut vite être écrasé par un système. »

Face à des situations souvent difficiles, Didier est rassuré de ne pas être seul. Il sait qu’il peut compter sur les volontaires permanents et d’autres alliés, avec qui il réfléchit à la manière d’être présent auprès des personnes en situation de précarité, sans prendre la parole à leur place.

Lui qui ne comprenait pas trop le sens d’ATD Quart Monde il y a six ans a changé de regard. « C’est difficile au début de comprendre ce type d’engagement, car nous avons trop dans la tête l’idée que la pauvreté peut être un objet de charité. En fait, on se rend compte que c’est un objet de combat pour des droits humains. On bascule alors dans un puits sans fond, mais il faut du temps pour mesurer cette dimension. »

Que ce soit lorsqu’il soutient des familles dans les démarches qu’elles entreprennent pour défendre leurs droits, lorsqu’il monte, avec d’autres membres, un chapiteau en plein centre-ville de Rennes pour le 17 octobre ou lorsqu’il bricole avec des militants Quart Monde, le Mouvement permet aujourd’hui à Didier d’enrichir sa vie de « moments intenses ». Julie Clair-Robelet

Cet article est extrait du Journal d’ATD Quart Monde de mars 2020.

Photo : Didier Auger à Montreuil en janvier 2020. © Alejandro Aparicio, ATD Quart Monde