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Le Président de la République à ATD Quart Monde

Alors que la stratégie pauvreté doit être annoncée dans les prochains jours, le Président de la République s’est rendu cet après-midi à ATD Quart Monde pour rencontrer des personnes concernées par la grande pauvreté. ATD Quart Monde salue cette visite ainsi que la qualité des échanges. Le Mouvement rappelle cependant que la participation des personnes concernées ne peut se limiter à des circonstances de calendrier. Condition nécessaire à la réussite de la lutte contre la pauvreté, elle doit être un processus organisé, qui s’inscrit dans la durée.

A quelques jours de l’annonce de sa stratégie de lutte contre la pauvreté, Emmanuel Macron a accepté de répondre favorablement à l’invitation lancée par ATD Quart Monde il y a un an et s’est rendu cet après-midi à Noisy-le-Grand, à l’endroit même où a été créé le Mouvement en 1957 par Joseph Wresinski et des habitants de l’ancien bidonville. Cette visite de 5 heures s’est déroulée en trois temps durant lesquels le Président de la République a pu échanger avec des personnes vivant ou ayant vécu dans la pauvreté.

C’est autour d’un repas qu’Emmanuel Macron a d’abord échangé avec des militants Quart Monde – personnes engagées au sein d’ATD Quart Monde qui vivent ou ont vécu la pauvreté, mais qui restent trop souvent à l’écart de l’élaboration des politiques publiques les concernant. Plusieurs thèmes ont été abordés : la réalité de la vie quotidienne relevant souvent du parcours du combattant, l’école et la formation des jeunes qui laissent trop souvent les plus exclus de côté, les conséquences que peuvent avoir les placements d’enfants quand ils ne sont pas pensés avec les familles. Des professionnels sont également intervenus pour expliquer comment les échanges avec des militants Quart Monde ont transformé leurs pratiques grâce au Croisement des savoirs et des pratiques ©, une méthode d’ATD Quart Monde où professionnels, chercheurs et personnes en situation de pauvreté travaillent ensemble, à égalité.

Puis le Président de la République s’est rendu dans les ateliers de l’entreprise solidaire d’ATD Quart Monde, Travailler et Apprendre Ensemble (TAE) – dont est inspirée l’expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée – pour y rencontrer les salariés. L’occasion pour ATD Quart Monde de réaffirmer que non seulement personne n’est inemployable mais aussi qu’un autre mode de management – plus incluant, plus convivial et plus flexible afin que chacun puisse trouver sa place au sein de l’entreprise – est possible.

Visite de l’entreprise Travailler et Apprendre Ensemble

Enfin, des parents ont fait visiter à Emmanuel Macron l’espace Petite Enfance du Centre de promotion familiale, culturelle et sociale d’ATD Quart Monde – un lieu où ATD Quart Monde accompagne les familles afin qu’elles puissent accéder à leurs droits fondamentaux : logement certes, mais aussi travail, santé, vie familiale, école, culture…

Visite de l’espace Petite Enfance

Pour Claire Hédon, présidente d’ATD Quart Monde : « Cette rencontre avec Emmanuel Macron placée sous le signe du dialogue avec les premiers concernés est un signal encourageant. Ce qui importe aujourd’hui c’est que le Président reparte convaincu que les personnes vivant dans la pauvreté ont une intelligence et une expérience dont nous ne pouvons pas nous passer pour lutter efficacement contre la grande pauvreté. Elles peuvent et doivent être reconnues comme de véritables partenaires, que ce soit au niveau des grandes orientations politiques ou dans les espaces de la vie quotidienne, comme à l’école par exemple. »

Contact presse :

Emilie Perraudin / emilie.perraudin@atd-quartmonde.org / 06.28.61.69.05
Hélène Pinazo / helene.pinazo@atd-quartmonde.org / 06.18.05.29.83

Quelques verbatim de la rencontre entre le Président de la République et les militants Quart Monde :

Sylvie
« Le regard que l’on porte sur nous n’est pas adapté. Souvent, on pense à notre place, on décide à notre place et on nous prend pour des incapables. On nous voit que comme des personnes pauvres alors qu’on n’a pas choisi cette situation et nous voulons nous en sortir. Je répète que ce n’est pas parce que l’on vit dans la pauvreté qu’on est des imbéciles ».

Martine
« Quand on parle de pauvreté, nous ne parlons pas « d’accident de parcours » individuel, mais bien de toute une population, tout un milieu qui vit l’exclusion, l’humiliation et la honte qui se transmet de génération en génération. On a parlé de nous comme des sous-prolétaires, des cas sociaux, des marginaux, des citoyens de seconde zone, ceux dont on n’attend rien, considérés comme inutiles, incapables, démissionnaires, dépendants du social. On nous accuse souvent d’être des profiteurs, des fraudeurs, des fainéants qui préfèrent se la couler douce avec le RSA plutôt que de travailler. Ceux qui tiennent ces propos sont dans l’ignorance de ce que nous vivons au quotidien, trop loin de nous pour percevoir le degré de courage, la ténacité, la résistance dont on doit faire preuve au quotidien pour rester des hommes et des femmes debout. Vivre dans la grande pauvreté, Monsieur le Président, ce n’est pas vivre, c’est survivre. »

Marie-Thérèse
« On oriente très vite nos enfants vers l’enseignement spécialisé (ULIS, SEGPA, IMPRO), par exemple en 2015, 72 % des élèves de SEGPA viennent de milieux défavorisés et quand on sait que 58 % des élèves de SEGPA sortent de l’école sans aucun diplôme, on ne peut pas croire que l’école a la même ambition pour tous les enfants. (…) Au moment de l’orientation, on donne l’impression que l’enfant peut choisir alors que beaucoup d’enfants de familles pauvres sont orientés vers les branches où il reste de la place mais ce n’est pas ce qu’ils avaient choisi. Les jeunes sont découragés car ce n’est pas ce qu’ils voulaient faire. Beaucoup de jeunes sortent de l’école sans formation, ils se retrouvent alors sans emploi. Arrêtons de dire que nos enfants sont en échec à l’école mais disons que l’école est en échec avec nos enfants ».

Christopher
« (Après des années difficiles au collège et au lycée) finalement j’ai été orienté en filière horticulture, ce n’est pas moi qui ai fait mon propre choix. Et j’ai pas eu mon CAP. Quand j’ai quitté le lycée je me suis orienté vers la Mission Locale. (…) Il fallait qu’en vingt minutes je dise tout à ma conseillère. Ça coinçait, on ne peut pas exprimer ce que l’on vit en si peu de temps. Et ça nous coince dans nos démarches. Je n’en veux aux conseillers de Mission Locale. Il faut qu’on puisse leur donner les moyens de faire leur travail. Aujourd’hui, J’ai trouvé un service civique qui me plait. J’acquière des compétences pour travailler comme je le souhaite dans la vente. Le service civique me permet de vivre une nouvelle expérience qui donne me donne confiance en moi. »

Gwendal
« Pour le suivi, les personnels des Missions locales ou de Pôle Emploi ne se rendent pas toujours compte des problèmes qu’on a. On a l’impression qu’ils appliquent des procédures sans regarder la réalité de la vie des gens. (…) J’étais chauffeur routier ; quand je me suis retrouvé seul avec mes enfants, j’ai dû démissionner. Mon patron m’a dit « je ne fais pas de social ». Je n’ai même pas obtenu la rupture conventionnelle. Soit je démissionnais, soit je devais mettre mes enfants à la DASS. Après ma démission, je n’avais aucune aide, pas d’indemnité. Pourtant le placement de mes enfants ça aurait coûté au département 400 euros par jour. »