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Le droit de grève : réflexions de l’Université Populaire

Le droit de grève était le sujet de l’Université populaire Quart Monde en Champagne Ardenne le 3 décembre 2019. Les militants du groupe « Verrerie » (nom d’un des groupes de préparation) avaient choisi ce thème en lien avec l’actualité, deux jours avant un mouvement social largement annoncé contre la réforme des retraites.

En introduction les militants ont présenté l’historique de ce droit, puis énoncé les conditions d’exercice du droit de grève, enfin ils ont donné quelques exemples de grèves ayant apporté des améliorations : maintien d’un service de maternité, reprise d’une entreprise en coopérative, adaptation des horaires… Patrice Perret, syndicaliste et retraité de la SNCF était l’invité de cette Université populaire Quart Monde.

Différentes réalités

Les militants du groupe « Temps des Cerises » ont apporté deux pancartes. L’une en négatif, évoquait les violences faites aux personnes. Ils avaient surtout en tête les violences policières. Une personne a dit: « tout le monde est perdant ». La seconde pancarte, en positif, affirmait « qui ne risque rien n’a rien », une façon de dire que même si c’est compliqué, la grève est parfois nécessaire.

Les militants de Reims Sud ont réfléchi à partir d’un fait : une personne a été accusée – à tort – par son chef de ne pas respecter son contrat et de faire « trop d’heures ». Il a voulu la renvoyer. Les autres employés, solidaires, ont décidé de faire grève du travail et grève de la faim, ce qui a duré quatre jours. Elles ont gagné : le chef a annulé sa décision, et l’employée a gagné le respect. Elle est restée ensuite 25 ans dans l’entreprise.

Le groupe des étudiants s’est posé la question des grèves étudiantes et lycéennes, ce qu’ils ont déjà connu personnellement. Souvent les médias en parlent beaucoup mais les mesures prises ne sont jamais à la hauteur des attentes. Les étudiants étrangers comprennent les demandes par sentiment de solidarité mais sont étonnés de voir ces grèves.

Après ces échanges, tous les participants ont noté sur des post-it les mots qu’ils associaient au mot « grève », en y réfléchissant avec leurs voisins. Puis les mots ont été regroupés au centre par thèmes communs. Souvent les mots amènent des explications et questions.

Quelques mots entendus : Agir / Conflits / Ras le bol / Avenir / Droits / Stop / Inefficacité / Et les autres ? / Rêve / Manif / Collectif / Changement…

Exercice de post-it autour du mot grève, le 3 décembre 2019 ©ATDQM

« Est-ce que la grève concerne les plus pauvres ? »

Pour un militant, « les pauvres devraient faire grève. On ne sait même pas si on aura une retraite ». Pour une autre, « on veut bien faire grève, mais si on perd de l’argent comment on va nourrir nos enfants ? ». On note que « les acquis sociaux sont valables pour tous en France, grévistes ou non ».

L’invité  a ensuite témoigné alors de son vécu en 1995 où un projet de réforme de la SNCF et de la sécurité sociale a provoqué des grèves qui ont bloqué une partie du pays pendant 3 semaines. Il s’agissait de l’avenir de la santé pour tous, et de l’avenir du service public. La grève a été très suivie et soutenue par la population. Certains disaient « ils font grève pour nous ». Des collectes de solidarité ont été faites pour essayer de compenser les pertes de salaire. Ce souvenir est marquant dans l’histoire des mouvements sociaux, avec un fort sentiment de solidarité. Cependant, la grève ça coûte à tout le monde : il faut se priver de salaire, se mobiliser. Elle vient en dernier ressort, quand les discussions ne sont plus possibles.

Combats collectifs

La dernière question a élargi le débat aux combats collectifs. Personne n’a le souvenir de « grève » ou « manif » au nom d’ATD Quart Monde, mais des exemples de combats gagnés ont été cités. « Pour gagner, il a fallu que des gens haut placés soient intéressés par le sujet de la loi. Tout seuls on n’y arrivera pas ». « Je suis fière de dire qu’à ATD Quart Monde on a l’art de la parole, de créer des conditions qui permettent aux gens de prendre la parole, pour interpeller ensuite ».

Un sondage a été soumis à toute l’assemblée au début de la réunion, puis les mêmes questions ont été posées à la fin : « grève et solidarité, ça va ensemble ? » puis « grève et tolérance, ça va ensemble ? ». Quelques avis ont changé à la fin des échanges. On retient le fait que le dialogue éclaire les points de vue et peut amener à évoluer.

La conclusion de cette rencontre  a été donnée par l’invité : « Je ne connaissais pas votre mouvement, j’ai découvert une animation qui permet aux personnes de s’exprimer et une grande tolérance des avis. Vous faites des choses bien, ça permet de se faire une opinion, pour agir et rendre le monde meilleur. »