
Le droit au respect de la vie familiale
Fiche mise à jour en juin 2019
Attention. Ces fiches vous informent de vos droits mais il ne vous suffit pas d’avoir raison : encore vous faut-il le prouver. C’est pourquoi il faut garder des traces écrites de vos demandes et des réponses importantes qui vous sont données oralement par l’administration car des justificatifs vous seront peut-être demandés un jour. Par exemple, en faisant/refaisant votre demande par lettre avec accusé de réception, dont vous gardez une copie, ou en demandant de justifier un refus. Faites vous également accompagner par vos proches. N’hésitez pas à lire aussi les « Principes et savoir-faire d’un comité « Solidaires pour les Droits » (https://www.atd-quartmonde.
Le droit à une vie familiale est à la fois protégé en droit international par la Convention internationale des droits de l’enfant, la Convention Européenne des Droits de l’Homme et par le droit français.
Le droit international
L’article 9 de la convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) prévoit que ce droit de vivre en famille n’est pas seulement un droit des parents mais aussi un droit de l’enfant : « Les États parties veillent à ce que l’enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l’intérêt supérieur de l’enfant. »
Le droit européen
Selon l’article 8 de la Convention Européenne des droits de l’homme : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. »
Selon la Cour européenne des droits de l’homme, le placement est en soi une violation du droit de vivre en famille. Pour un parent et son enfant, être ensemble représente un élément fondamental de la vie familiale. Cette violation du droit à une vie familiale, induite par le placement d’un enfant, ne peut être justifiée que si les trois conditions suivantes sont remplies :
1. Le placement de l’enfant doit être prévue par la loi interne du pays ;
2. La décision de placement doit être légitime ;
3.La décision de placement doit être nécessaire dans une société démocratique ;
1 – Le plus souvent, la première condition est remplie, car les lois permettant le placement d’un enfant sont toujours adoptées par les Etats. En France, c’est l’article 375 du Code civil qui prévoit que : « Si la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises, des mesures d’assistance éducative peuvent être ordonnées par justice à la requête des père et mère conjointement, ou de l’un d’eux, de la personne ou du service à qui l’enfant a été confié ou du tuteur, du mineur lui-même ou du ministère public. »
2 – La deuxième condition de légitimité suppose que la décision de retirer un enfant de sa famille soit prise dans le but de protéger l’enfant.
3 – La troisième condition est que le placement doit être la seule mesure possible pour préserver l’intérêt de l’enfant. La Cour européenne exige que le placement d’un enfant doit intervenir si et seulement si ses parents ne sont pas capables de s’occuper de lui en raison de leur état moral et physique instable ou en raison de leur comportement violent. La raison des problèmes matériels qu’ils pourraient rencontrer, comme par exemple le fait de vivre dans un logement insalubre ou encore de ne pas avoir assez de revenus n’est pas valable. La Cour, dans sa décision Wallowa et Walla c/République tchèque du 26 octobre 2006, a indiqué que , plutôt que de placer les enfants en raison du fait que les parents occupaient un logement inadéquat, l’Etat aurait du aider les parents à accéder à un logement adapté. Un placement d’enfant ne peut pas être fondé sur un manque de moyen matériel. Dans ce cas, les autorités nationales doivent plutôt compenser ce manque par d’autres moyens que celui de séparer la famille.
D’autre part, la Cour rappelle que , même si un enfant est accueilli dans un cadre plus propice à son éducation, cela ne justifie pas qu’on le soustraie de force aux soins de ses parents biologiques.
Dans la mesure où les enfants ne sont pas victimes d’un manque de soin ou de mauvais traitements de la part de leurs parents, les autorités doivent envisager d’autres mesures de soutien au lieu de celle de séparer les enfants de leurs parents, et cela même si les premières mesures de soutien se sont révélés insuffisantes.
Enfin , lorsque les trois conditions ont été réunies et que l’enfant a du être séparé de ses parents, la Cour précise que cette séparation doit avoir pour but d’ unir à nouveau la famille. Les autorités nationales doivent alors donner les moyens nécessaires à un futur regroupement, notamment dans l’organisation des rencontres entre les parents et les enfants et des enfants entre eux. Il n’est possible de placer les enfants loin de leurs parents et séparément que si c’est pour protéger l’enfant Ce n’est pas possible de le faire pour des raisons administrative comme le fait de n’avoir pas les moyens matériels de faire autrement. » Les liens entre les membres d’une famille et les chances de regroupement réussis se trouveront par la force des choses affaiblis si l’on dresse des obstacles empêchant des rencontres faciles et régulières des intéressés » explique la Cour dans la décision Olsson c Suède du 24 mars 1988.
Le droit français
Selon l’article 375-2 du Code civil , « Chaque fois qu’il est possible, le mineur doit être maintenu dans son milieu actuel ». Le milieu actuel est celui dans lequel vit l’enfant avant que les services sociaux n’interviennent.
Selon l’article L 311-9 du Code de l’action sociale et des familles : « En vue d’assurer le respect du droit à une vie familiale des membres des familles accueillies dans les établissements ou services mentionnés aux 1°, 8° et 13 °de l’article L 312-1, ces établissements ou services doivent rechercher une solution évitant la séparation de ces personnes ou, si une telle solution ne peut être trouvée, établir de concert avec les personnes accueillies, un projet propre à permettre leur réunion dans les plus brefs délais, et assurer le suivi de ce projet jusqu’à ce qu’il aboutisse. » Cela signifie notamment que lorsqu’un enfant est confié à l’Aide sociale à l’enfance, le service doit travailler à la réunion de l’enfant et de ses parents et établir un projet pour l’enfant.