
« La Garantie « Accès santé » : une couverture santé inégalée »
Huguette Boissonnat, chirurgien-dentiste, alliée d’ATD Quart Monde, est vice-présidente de l’association ACS-P.
Comment est né cette complémentaire santé ?
Les non-recours aux complémentaires santé et les renoncements aux soins touchent un nombre important de personnes en précarité, en particulier parmi celles qui bénéficient de l’ACS(1) (voir ci-dessous). Les conséquences sur la santé de chacun sont terribles. C’est pourquoi, à la demande de personnes en grande précarité engagées dans le Mouvement ATD Quart Monde et avec elles, une recherche action a été lancée en Lorraine en 2009 afin de créer un contrat de garantie santé et prévoyance qui réponde aux besoins le mieux possible. Puis, en juin 2013, la création de l’association ACS-P(2) a permis au travers d’une association nationale de proposer un contrat santé et prévoyance inspiré de ce modèle.
Quelle nouveauté cette complémentaire représente-t-elle ?
Jusqu’alors, les personnes bénéficiant de l’ACS ne pouvaient souscrire que des contrats individuels, à des conditions moins intéressantes – sauf à payer cher – que celles des contrats collectifs auxquels ont accès les salariés avec la participation de l’employeur. Cette complémentaire est un contrat collectif. Comme tel, il est financé en partie par un tiers (ici, l’ACS) et ne tient pas compte de l’état de santé, de l’âge et des revenus de la personne. Il propose une couverture santé inégalée, car pensée avec les bénéficiaires et négociée au mieux avec les mutuelles.
Les pouvoirs publics soutiennent-ils le développement de votre complémentaire ?
La généralisation de l’accès à la complémentaire santé est au cœur de la stratégie nationale de santé énoncée par la ministre Marisol Touraine, qui suit le développement de cette complémentaire avec beaucoup d’attention. Les pouvoirs publics viennent de lancer un appel d’offres invitant les mutuelles à concevoir de nouveaux contrats à l’intention des bénéficiaires de l’ACS. Cet appel d’offres distingue trois niveaux de garanties : un premier niveau peu coûteux, un niveau intermédiaire et un troisième qui propose une très bonne couverture, mais avec un montant de cotisation élevé.
Cela ne présente-t-il pas un risque ?
En effet, chaque garantie devant équilibrer son budget (c’est une obligation légale), on peut s’attendre à ce que les contrats de premier niveau procurent une couverture santé minimum. Les personnes en précarité risquent d’aller soit vers ces contrats de premier niveau, où ils trouveront une moins bonne protection qu’avec notre complémentaire, soit, si elles ont besoin de soins importants, vers le troisième niveau, avec des cotisations plus élevées que celles de notre complémentaire.
Etes-vous optimiste sur l’issue de cet appel d’offres ?
Nous allons concourir à cet appel d’offre et nous serons extrêmement attentifs à la manière dont les nouveaux contrats vont se mettre en place, afin de continuer de proposer aux personnes éligibles à l’ACS des contrats de grande qualité pour un coût abordable.
JCS
La complémentaire « Accès santé »
– pas d’avance à faire pour les frais médicaux, comme pour la CMU-C,
– une couverture intégrale des équipements en optique grâce aux prix négociés avec le réseau Kalivia,
– une couverture dentaire qui se rapproche de celle de la CMU-C,
– une indemnité de frais d’obsèques de 2800 euros environ,
– un forfait pour prothèse auditive de 350 € par appareil,
– une indemnité de naissance de 125 €,
– les cotisations mensuelles après déduction de l’ACS : 9,67 € pour les moins de 16 ans, 11,33 € de 16 à 49 ans, 17,83 € de 50 à 59 ans, 21,17 € à partir de 60 ans et plus.
Pour toute info : 09 80 98 00 76
Les obstacles de l’accès aux soins
Les non-recours
– 20 % des bénéficiaires potentiels n’avaient pas recours à la CMU-C fin 2012
– 78 % des bénéficiaires potentiels de l’ACS n’y avaient pas recours en 2011
(sources : Fonds CMU 2012 et rapport 2014 du Défenseur des Droits sur les refus de soins)
Les renoncements aux soins touchent
– 20,4 % des bénéficiaires de la CMU-C
– 33 % des personnes sans complémentaire santé
(source : rapport du Sénat de septembre 2013)
Les refus de soins aux bénéficiaires de la CMU
– 32 % chez les dentistes
– 31 % chez les ophtalmologues
(source : Fonds CMU, « Les refus de soins : le testing 2009 »)
L’espérance de vie à 35 ans :
– 47,2 ans pour un cadre
– 40,9 ans pour un ouvrier
– 30,9 ans pour une personne sans emploi
(source N. Blanpain, Insee Première, n° 1372, 2011)