
Ecrire pour se faire entendre
Gavin Uzell jeune militant irlandais d’ATD Quart Monde anime le projet « I have a dream »(1), une référence au combat pacifique de Martin Luther King.
Gavin Uzell, 24 ans, est très actif au sein du Mouvement en Irlande. Il est dans l’équipe du projet « I have a dream », inspiré du discours du militant pour les droits des Noirs américains Martin Luther King. Il anime des ateliers d’écriture où les jeunes écrivent leurs rêves pour vaincre la pauvreté en Irlande, avec leur histoire en toile de fond.
Pour Gavin, l’écriture permet de « donner la parole aux gens » et « c’est quelque chose qui peut durer éternellement ». Lui-même a publié une histoire dans le recueil « If only you knew : Stories of change » (« Si seulement vous saviez : Des histoires de changement »). Un projet mené lors de la campagne 2017 Stop Pauvreté, qui a recueilli des récits de moments positifs racontés par des personnes ayant vécu des difficultés.
J’ai rencontré Gavin lors de ma tournée européenne, en tant que responsable de la Dynamique jeunesse, pour réaliser un état des lieux de nos actions. Qui sont les jeunes avec qui le Mouvement est en lien ? Comment contribuent-ils à bâtir une société sans exclusion ?
Pour mieux se faire comprendre, Gavin, qui fait des petits boulots, a tenu à me faire visiter le quartier où il a grandi : Darndale. Un quartier de logements sociaux au nord-est de Dublin, considéré comme l’un des plus pauvres du pays. Réservé, Gavin parle peu mais ses mots portent. Je lui laisse la parole.
Grandir à Darndale
« Quand tu as des problèmes de logement, on te force à aller dans un hébergement d’urgence, puis on te trouve un logement. Les familles se retrouvent dans cet environnement avec des écoles de quartier mal réputées, de la délinquance… Elles n’ont pas le choix et tombent dans la stigmatisation, avec une forte présence policière
Les jeunes de Darndale sont nés dans un environnement difficile. Pour moi, si un enfant grandit sans disposer de l’essentiel, il finira par prendre la mauvaise voie à l’adolescence.
Les jeunes ici n’ont pas beaucoup d’opportunités ni de conseils. En face des institutions, tu es censé agir comme tout le monde même si ta vie a été complètement différente. Les institutions ne veulent pas entendre ta triste histoire. Elles s’en fichent, elles veulent juste voir tes papiers.
J’ai tout de même eu de bonnes expériences avec des travailleurs sociaux. Cela m’a prouvé que c’était possible. Ces professionnels peuvent avoir un impact sur la vie des gens. Mais ils ne sont pas assez nombreux. »
La rencontre avec ATD Quart Monde
« J’ai rencontré ATD Quart Monde grâce à Paul, mon oncle. J’ai assisté à la Journée mondiale du refus de la misère le 17 octobre 2014 à Dublin. Il n’y avait pas beaucoup de jeunes alors impliqués dans le Mouvement mais j’ai été très bien accueilli.
Depuis que j’ai terminé ma formation début 2017, je m’implique beaucoup plus. Notamment depuis le rassemblement européen de l’été 2017 à Wijhe (Pays-Bas).
Cette rencontre des jeunes d’ATD Quart Monde m’a ouvert l’esprit. Quand je suis arrivé, je me suis demandé : « mais qu’est-ce que je fais ici ? ». Je n’étais pas habitué aux différents modes de vie, cultures… J’ai trouvé les gens étranges.
Une fois que je les ai connus, j’ai aimé tout le monde et ça a changé ma façon de penser aux autres. Wijhe m’a appris à ne pas me faire une opinion sur les gens sans les connaître. En plus, je suis fier d’avoir été impliqué dans la préparation de l’événement.
Pour moi, faire partie d’ATD, c’est faire partie d’un environnement ouvert et confiant où il n’y a pas de figures d’autorité, où nous travaillons en équipe. Il m’a fallu un peu de temps pour comprendre le Mouvement. Si je devais l’expliquer, je dirais que le travail d’ATD est de restaurer la dignité des personnes en leur donnant une voix, en leur faisant sentir qu’ils font partie de quelque chose sans leur mettre de pression. Tout le monde est apprécié et a une opinion. »
Suivre nos rêves
« Je vis mon rêve maintenant. J’ai eu une vie dure et aujourd’hui je me sens en paix, en sécurité. La tranquillité d’esprit vaut plus que tout l’argent pour moi. J’ai accumulé des connaissances, j’ai du vécu. Je veux utiliser cette expérience pour changer les choses, montrer à d’autres jeunes que c’est possible.
C’est difficile de s’ouvrir aux autres et de raconter sa propre histoire. Mais je crois qu’il arrive un moment dans la vie où on doit faire un choix : suivre nos rêves sans faire attention aux autres ou poursuivre ses rêves tout en aidant les autres à y arriver aussi. »
Jennifer, 30 ans, Dynamique jeunesse