Entrez votre recherche ci-dessous :

Du mal logement au signalement : Témoignage d’un militant d’Armentières (Nord)

Témoignage d’un militant d’Armentières (Nord) pour les droits de l’homme :

« En 2009, Roselyne m’a présenté Mme C et ses parents, habitant ensemble. Une famille qu’elle connaît depuis de nombreuses années. Au début, il s’agissait d’accompagner les parents de Mme C. dans leurs démarches. Ils devaient quitter leur logement et souhaitaient un coup de main pour « monter » un dossier DALO. Ce qui fut fait en collaboration avec le service social de la CAF. Ils ont obtenu satisfaction.

Mme C., son compagnon et leurs deux enfants se sont installés en HLM. Les soucis pour cette jeune maman : sa fragilité psychologique et son problème de vue. M et Mme C sont très influençables et ne savent pas comment faire face quand les ennuis arrivent. Par conséquent, Roselyne m’a demandé de les soutenir.

Elle m’a expliqué que le jeune couple rencontrait des gros ennuis avec un voisin qui loge dans le même bâtiment. Elle a conseillé aux deux jeunes de venir me voir chez moi car je dispose d’un ordinateur. Le voisin est instable et se montre parfois violent. S’en suivent des querelles répétées à propos des enfants qui jouent et font du bruit, l’immeuble étant vétuste, on peut entendre tout ce qui s’y passe.

Le service de « Proximité » de la Mairie est intervenu sur place de nombreuses fois pour tenter une médiation. En vain ! Le voisin ne voulait pas entendre raison.

La police a dû se déplacer plusieurs fois quand la situation s’envenimait (insultes, coups) et une première plainte pour violence volontaire a été déposée. Par la suite, après d’autres agressions, le couple a voulu déposer à nouveau une plainte pour coups et blessures et harcèlement, mais les policiers ont refusé..Mme C. et moi avons écrit au Procureur pour signaler ce fait, conseillés par un avocat.

Lassée par cette situation qui leur « pourrissait » la vie, Mme C. avait sur un coup de tête, demandé la résiliation de son bail auprès de l’organisme HLM. J’ai donc décidé, en accord avec le jeune couple, de constituer un « Comité de Soutien » afin d’éviter une catastrophe pour cette famille.

Lors de notre réunion régionale du groupe Accès aux droits fondamentaux ATD Quart Monde, j’ai présenté le problème. J’ai insisté sur le fait que Madame C. avait agi sans vraiment réfléchir aux conséquences de son courrier aux HLM. L’équipe a accepté de soutenir cette famille. J’ai fait circuler un document intitulé « Comité de soutien », tous ont signé ainsi que les amis de la mairie et de la délégation régionale d’ATD Quart Monde. 27 personnes ont accepté de soutenir Madame C. et sa famille.

Ensuite, nous avons adressé une lettre à l’organisme HLM afin d’éviter qu’ils soient mis dehors en fin de bail. Le groupe Habitat du Nord a répondu pour confirmer que la famille ne serait pas mise à la porte « à titre exceptionnel ». Belle décision !

Seulement, quand on a la guigne, rien ne se passe comme on le voudrait. Madame C. et son mari m’ont avoué plus tard qu’ils avaient sollicité des aides à plusieurs reprises auprès des services sociaux pour arriver à payer les charges courantes : Monsieur C. vient d’être licencié. Et, un soir, je reçois un coup de téléphone de Madame C., affolée, qui me dit avoir reçu une convocation chez le juge pour enfants.

Je lui promets de l’accompagner, car Madame C. est en grande souffrance. Je sais bien ce qu’il faut faire et éviter en pareil cas. J’ai moi-même vécu le placement de mes enfants durant huit ans et je sais combien ça fait souffrir. J’accompagne souvent des familles au tribunal pour ces affaires-là. Je conseille vivement à Madame C. de prendre un avocat, pour faire face, car elle est terrorisée.

Avec l’avocate, nous conseillons Madame C. sur l’attitude à adopter en face de la Juge. Je la connais et je sais qu’elle est sévère. L’avocate et moi sommes sûrs qu’une mesure d’AEMO (Assistance Educative Milieu Ouvert) va être proposée. Je recommande vivement à Madame C. d’accepter si la juge lui demande, sinon ce sera le service ASE local qui sera désigné. Ils n’ont pas pour habitude d’écouter les familles.
Beaucoup de placements en résultent.

Parfois, je peux entrer et participer aux débats. Mais pas avec cette juge-là ! Je suis prié de rester dans le couloir et d’attendre. En fin d’audience, l’avocate me dit que c’est bien les services sociaux qui ont fait un signalement et que tout le ramdam autour de la famille (police, voisins, etc.) y a contribué. La juge a ordonné un « Complément d’informations » avant de rendre sa décision. Une enquête va avoir lieu. Un organisme social sera désigné durant 18 mois pour cela. Je respire, car le placement n’est pas encore ordonné.

J’explique à Madame C. ce qui va arriver. Le tribunal va désigner soit l’ASE soit un autre organisme. Je lui conseille surtout de ne pas refuser la visite de la personne chargée du suivi. Maintenant, j’aide Madame C. pour ses recherches de logement car il n’est pas envisageable qu’elle reste vivre dans cet environnement hostile, et l’ai présenté au COLOLO (Collectif Local Logement) qui est un organisme agréé afin qu’elle puisse obtenir une aide supplémentaire pour se reloger. Cet organisme est très efficace. Ils ont une assistante sociale et des démarcheurs qui prennent contact avec les bailleurs privés ou sociaux.
J’informe régulièrement les membres signataires de l’évolution de la situation. Nous nous battons ensemble et j’espère que d’autres nous rejoindront.