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« C’est quoi le bonheur ? », un film collectif sur un sans-abri à Marseille

ATD Quart Monde remet ce samedi 11 juin au Méliès, à Montreuil, le prix « Agir tous pour la dignité » au film Hector, portrait d’un SDF écossais qui réussit à remonter la pente. A Marseille, pendant deux ans, des militants et amis du Mouvement ont participé à l’écriture, au tournage et au montage d’un film sur un sans abri marseillais qui se bat pour vivre dignement (1). Récit d’une aventure.

« C’est quoi le bonheur ? » a été présenté le 17 octobre dernier au festival des Rencontres Inattendues organisé à Marseille par 8 associations dont ATD Quart Monde. Il raconte la journée d’un sans domicile fixe qui se fait jeter d’un café où il voulait aller aux toilettes et son combat pour rester propre et digne. Cinq militants et amis du Mouvement, ayant connu la grande pauvreté, ont répondu à Feuille de route.

Une aventure collective

« On était avec des étudiants, des retraités, des gens des associations, des personnes accueillies… Il y avait aussi le metteur en scène, un responsable théâtre, des gens de différents horizons. C’est cette confrontation qui m’a intéressé. » (Christian, qui joue un client du café lisant le journal)

« Ce qui m’a plu, c’est que c’est une histoire réelle. On a commencé à l’imaginer le jour où on s’est tous réunis. Je joue le patron de bar méchant. Mais ce que je dis, c’est le metteur en scène qui m’a dit de le dire. C’est un rôle. » (Robert)

« Ca a duré deux ans, il a fallu de la patience, j’ai surtout aimé la convivialité et la joie. » (Jacqueline, la patronne du bar)

« On s’est soutenu, on a partagé beaucoup de choses. Je suis une des trois touristes, le SDF nous dit où est Notre Dame de la Garde. Après, je dis aux autres qui ont vu qu’il était à la rue: « on le connaît pas, on ne peut pas juger. C’est moi qui ai trouvé ça, c’est mon avis. » (Gisèle)

Une autre image du sans abri

« Ce qu’on a voulu, c’est montrer un SDF qui soit pas, comme dans tous les films, un pauvre type, sale et soulard, mais un type à la rue intelligent, propre et qui cherche à s’en sortir. Oui, il y a des pochards. J’ai été des deux côtés : à la rue et aujourd’hui dans des associations. Tous les matins, je fais des petits déjeuners pour des SDF. J’en vois des délabrés, désoeuvrés. Mais je vois aussi les autres. » (Christian)

« Changer l’image des SDF avec ce film, c’est difficile. Il y en a au bout du rouleau, l’alcool ça aide. Et puis à Marseille, il y a des centaines de milliers de mètres carrés libres mais pas de place pour leur construire des douches. » (Adrien, joueur de cartes dans le café)

« Christian dit qu’un acteur peut aussi bien jouer le SDF parce qu’il va se renseigner, aller voir. Moi je dis que le SDF en saura toujours plus, ça vient tout seul pour lui. » (Gisèle)

C’est quoi le bonheur ?

« A la fin du film, on pose la question au gars à la rue : « C’est quoi le bonheur ? » A partir de là, on est parti dans la réflexion avec les autres… On s’est dégagé du plancher des vaches en quelque sorte. C’est un domaine tellement vaste. Chacun a sa définition. Pour celui qui a faim, le bonheur, c’est une soupe, un restau du coeur. Pour moi, le bonheur c’est une étoile filante. Si on a de la chance, c’est une comète, ça revient. Mais le vrai bonheur, ça passe en vitesse. » (Adrien)

« Pour moi, c’est quand je suis dans les bras de ma femme, et ça fait 38 ans qu’on est ensemble. » (Robert)

 

(1) L’atelier a été animé par Pierre-Jean Ricard, du GEM (Groupe d’entraide mutuelle) Mine de rien qui organise le Festival du film précaire d’Avignon.

Lire l’interview d’Andrea Grunert sur l’image de la pauvreté au cinéma.