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Château d’Alincourt (Oise) : le rêve se transforme en cauchemar pour 63 familles

Isolées à l’écart de toute habitation, 63 familles vivaient à demeure au « camping-caraving du château d’Alincourt » (Oise). Moyennant un loyer mensuel de 350 euros, certaines étant locataires de leur mobil-home et d’autres propriétaires, ces 63 familles vivaient en parfait accord avec l’ancienne propriétaire, jusqu’à ce que la vente par adjudication du domaine transforme leur rêve en véritable cauchemar.

Ne souhaitant pas leur maintien sur place, le nouveau propriétaire des lieux ne lésine pas sur les « moyens de persuasion ». Pour parvenir à ses fins il procède à des menaces directes avec des chiens, intimidations, humiliations, contrôle d’identité à l’entrée du camp par des vigiles, fouilles des voitures… Tout l’arsenal des mesures de harcèlement est utilisé par ce nouveau « châtelain » pour faire partir ces familles, au mépris du droit et de la loi.
La situation s’est dégradée tout au long de l’année: non remise du courrier, tapage nocturne avec des pétards et une puissante sonorisation la nuit près des habitations. Supportant mal de tels actes de violences, certaines partent d’elles mêmes cherchant un autre hébergement parfois chez des proches.
D’autres présentent de graves troubles de santé. En mai 2009, alors qu’il reste une trentaine de familles, la pression se fait encore plus forte quand, le propriétaire refusant de renouveler le contrat, EDF coupe le courant pour l’ensemble des caravanes et mobil-homes. Ces familles, locataires de leur emplacement, sont pourtant dans leur droit même s’il s’agit ici d’un domaine privé. Elles ont vainement tenté de faire cesser ces pratiques et de faire reconnaître leur point de vue en déposant plusieurs plaintes auprès de la gendarmerie et du Procureur de la République. Aucune suite n’a été donnée à leurs démarches.

Il a fallu attendre le mois de juin 2009, alors que des associations comme le DAL (Droit au Logement), le Secours Catholique, la Ligue des Droits de l’Homme, ATD Quart Monde, etc. apportent leur soutien aux familles une démarche officielle est effectuée auprès de la préfecture qui ne s’estime pas concerné, ce conflit étant d’ordre privé. La gendarmerie n’intervient pas malgré les dangers et menaces physiques exercées sur les familles. Le service de sécurité du propriétaire est même surpris – et filmé- en train de cambrioler les habitations (document diffusé ultérieurement sur France 3 Picardie).
En juillet 2009, il ne subsiste qu’une vingtaine de familles et l’un des résidents, chassé de chez lui, est décédé dans le camion où il avait trouvé refuge. Au fil des mois, plusieurs de ces habitants, en mauvaise santé, ont perdu leur emploi. Certaines partent, épuisées, à bout de ressources, et d’autres ne savent où aller…Malgré l’intervention des services sociaux locaux, aucune aide juridique ni psychologique ne leur est apportée. Certains ont aussi la chance, avec l’appui des travailleurs sociaux de retrouver un hébergement grâce au DALO (Droit au logement opposable) où leur situation est reconnue comme prioritaire. Sur plainte du propriétaire, l’affaire est examinée par le Tribunal de Grande Instance de Beauvais le 22 juillet. Les familles se sont constituées en collectif et plaident leur cause avec un avocat… qui ne s’est pas déplacé. Dans l’attente du jugement, la situation, des familles se dégrade encore davantage tout au long de l’été, avec la crainte qu’après l’électricité on ne leur coupe l’eau.
Il ne reste plus que 14 familles sur place en septembre 2009, quand le tribunal rend publique sa décision: l’expulsion de toutes les familles à compter du 31 décembre 2009, en plein hiver!
Avec l’aide de l’assistante sociale, soutenue par ATD Quart Monde, des solutions sont recherchées dans l’urgence pour reloger les familles. La préfecture, à nouveau sollicitée, décide de financer et de démissionner un opérateur, la Darse, pour reloger les familles. Une négociation s’établit également avec la préfecture pour que celle ci ne décrète pas l’expulsion avant le 15 mars 2010, date de la levée de la « trêve sociale ».
Dans le même temps, grâce au soutien du comité solidaire et du DAL,une négociation difficile s’est établie avec un représentant du « châtelain » pour indemniser les propriétaires des mobil-homes (pas les locataires). L’indemnisation est modeste. Pour une famille elle est évaluée à 5% de la valeur réelle de son bien. Peu à peu les familles partent. Dispersées, mais relogées. Seule une famille refuse de partir faute de proposition adaptées à ses besoins.

A la date du 20 février, enfin une bonne nouvelle : une petite maison est proposée au couple et lui sera mise à disposition au 1er mai. Pour le comité de soutien, il faut maintenant convaincre la préfecture, qu’elle puisse être maintenue sur place jusqu’à cette date.
La demande a été formulée auprès du juge chargé des exécutions pour qu’il respecte ce délai.

Tout au long de ce difficile combat, face à des violences inadmissibles, à une incompréhension des pouvoirs publics, seul le soutien du comité solidaire avec le DAL et de l’assistante sociale du secteur s’est révélé efficace.