
Idées fausses : « C’est leur culture qui enferme les pauvres dans la pauvreté » C’est faux !
Faux. Il n’existe pas de « culture de la pauvreté » qui empêcherait les personnes en précarité de s’intégrer à la société.
Les personnes en situation de pauvreté partagent-elles des croyances, des valeurs et des comportements essentiellement négatifs (la résignation, la vie au jour le jour, une répugnance pour le travail et pour l’école, une « culture de l’assistance », une culture des droits et non des devoirs, un abus de drogues et d’alcool, etc.) qui les empêcheraient de s’intégrer dans la société et seraient en grande partie à l’origine de leur pauvreté ? L’anthropologue Oscar Lewis a popularisé en 1961 cette notion d’une « culture de la pauvreté », dans son livre Les Enfants de Sánchez.
Cette thèse a desservi les pauvres du monde entier pendant des décennies. Elle a été contredite par des études[1] qui montrent que ce sont les facteurs structurels (économiques, sociaux, politiques…) qui sont avant tout à l’origine de la pauvreté (voir aussi les idées fausses 4 et 12). Une étude britannique sur les « familles qui n’ont jamais travaillé »[2] montre que ces cas sont extrêmement rares et que les phases d’inactivité correspondent plus à des étapes de la vie (par exemple situation de parent isolé avec de jeunes enfants, etc.), qu’à un état permanent.
Le rapport « Grande pauvreté et précarité économique et sociale »[3] explique que « [en milieu de pauvreté], on prend ses distances par rapport à la culture environnante, perçue comme une agression, parce qu’elle révèle sans ménagements vos ignorances et incapacités. On en vit cependant des valeurs de base. C’est le manque de moyens de les appliquer concrètement qui use l’adhésion et conduit à l’occasion à des comportements contraires. »
[Article mis à jour en décembre 2019]
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[1] Voir par exemple D. Billings, « Culture and Poverty in Appalachia : A Theoretical Discussion and Empirical Analysis », in Social Forces, 53 (2), 1974 ; ou W. J. Wilson, « More Than Just Race : Being Black and Poor in the Inner City », New York, W. W. Norton & Company, 2009 ; ou encore M. R. Rank, H. S. Yoon, T. A. Hirschl, « American Poverty as a Structural Failing: Evidence and Arguments », The Journal of Sociology & Social Welfare, 2015.
[2] A. Rosso, D. Gaffney, J. Portes, « What explains the growth in « never-worked » households? », Joseph Rowntree Foundation, 2015.
[3] Avis adopté par le Conseil économique, social et environnemental les 10 et 11 février 1987, sur la base du rapport « Grande pauvreté et précarité économique et sociale » présenté par J. Wresinski, op. cit., p. 56.