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Cinquantenaire de 1968 : Apporter le savoir au cœur des cités

Gérard Bureau s’est engagé comme volontaire permanent à ATD Quart Monde en 1973. A l’occasion du cinquantenaire de 1968, il décrit les répercussions des événements dans l’action du Mouvement.

«  En 1974, j’ai pris le relais au Pivot culturel d’une cité de transit à Reims, appelée « le Maroc ». La population était assez mélangée. Nous étions deux volontaires à y habiter. A côté, il y avait un terrain avec des caravanes.

À l’époque, on pensait souvent que les familles les plus pauvres allaient changer leur vie à l’extérieur de leur cité, en envoyant leurs enfants à la bibliothèque municipale, aux centres aérés, aux centres de loisirs… En réalité, ils n’y allaient pas.

La proposition du père Joseph, dans la droite ligne de 1968 et de la dynamique du Savoir dans la rue, était d’apporter le savoir au coeur même des cités, pour que les familles découvrent les bienfaits de la culture et qu’à partir de là, elles développent leurs propres savoirs.

Dans la cité de Reims, il y avait une maternelle, un club de jeunes et un comité d’habitants. Le Pivot culturel était ouvert tous les jours. C’est le coeur du partage du savoir avec autour du livre, des ateliers de peinture, de musique, des ateliers manuels aussi. Car on partage tous les savoirs : c’est le « beau savoir ».

Le samedi, on allait sur le terrain des caravanes et on faisait une bibliothèque de rue pour les enfants qui ne venaient pas au Pivot. Nous avons été parmi les premiers à utiliser la littérature jeunesse. Souvent, on avait de plus beaux livres que les bibliothèques municipales.

Plus tard, j’ai été en mission à Noisy-le-Grand, à La Réunion, au Guatemala… Chaque fois, la bibliothèque de rue était la première chose que je faisais, pratiquement tous les jours, pour rencontrer les gens. On touche tellement de monde que se crée une dynamique sur laquelle on peut greffer d’autres projets.

À cette époque, les Pivots culturels et les bibliothèques de rue se développaient grâce aux étudiants. Dans la suite de 1968 et de l’appel du père Joseph aux étudiants pour qu’ils aillent dans les cités, ils venaient nombreux partager leurs savoirs le week-end et pendant les vacances.

Le père Joseph a ainsi donné un élan à l’éducation populaire dans les cités. Le savoir dans la rue était, pour lui, une invitation à mettre le savoir à la porte des personnes les plus démunies, y compris sous leurs fenêtres, avec cet implicite : ils n’iront pas si le savoir ne va pas à eux. Le savoir dans la rue est une invitation, un slogan. C’est pour cela que je ne l’emploie qu’avec un point d’exclamation ! »