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Amélie Lenninger : « La rue est mon terrain de jeux »

Amélie Lenninger, volontaire permanente, est  » en présence  » à Paris.

« La première fois que j’ai entendu parler d’ATD Quart Monde, un ami qui découvrait le volontariat permanent m’a dit : « On m’a donné la mission d’habiter un quartier défavorisé à Bruxelles. Je dois rencontrer les habitants, aller vers les plus exclus, apprendre d’eux. Ne rien proposer et écrire tous les jours ». J’ai su à cet instant que ce mouvement, ATD, je voudrais le découvrir de plus près.

Cette mission est ce qu’on appelle la « présence ». Depuis fin 2015, je l’assume à Paris intramuros. Un vaste territoire. Comment faire sur une telle superficie ? On m’a donné la liberté d’explorer, de trouver moi-même le moyen d’aller à la rencontre.

Routine

Après un an de recherche, de balades, de rencontres, j’ai construit une routine qui me permet notamment de tisser des liens avec des personnes qui vivent à la rue. La rue est un terrain de jeux où je passe la plupart de mes journées. Je suis présente aussi dans deux centres d’accueil de jour, dans les 5è et 20è arrondissements.

Pour moi, être en présence, c’est avant tout être avec les personnes qui vivent l’exclusion et la pauvreté. A Paris, il existe plusieurs lieux de distribution de repas, comme celui des Resto du Coeur le mardi à République. Il y a des centres d’accueil ouverts certains jours de la semaine, d’autres le soir et la nuit. Mais peu de structures ou associations proposent le petit-déjeuner et l’été, lorsque la plupart ferment, tout devient compliqué.

Etre en présence, cela peut se faire en étant bénévole pour une association, comme je le suis le jeudi au Centre Emmanuel, un accueil de jour pour des personnes sans domicile dans le 20è arrondissement. Mais c’est surtout être là. Tout simplement et attentivement. C’est comme cela que les rencontres se font.

Batteur

C’est de cette façon que j’ai rencontré Philippe, le batteur du groupe de musique que l’on vient de monter avec Joseph, un jeune que j’ai connu au Centre Emmanuel. Philippe, je le croise souvent à la Moquette, un lieu ouvert en soirée dans le 5è. Il est calme et souvent silencieux, concentré à remplir ses mots fléchés ou à disputer une partie d’échecs. Quelquefois nous nous rencontrons aussi au Centre Emmanuel.

Un jour, nous nous sommes vus à la Cantine, une cantine populaire et à prix libre. Après des mois à se croiser, nous avons échangé quelques mots. Quelques mois plus tard, nous fêtions Noël au Centre Emmanuel en musique et Philippe nous apprit qu’il jouait de la batterie. Le jour où nous avons décidé de monter notre groupe avec Joseph, nous avons parcouru les centres d’accueil pour lui proposer de nous rejoindre.

Philippe n’a pas de téléphone. Alors pour se rencontrer, c’est pas facile. Mais nous avons les mêmes adresses et je sais aujourd’hui comment le retrouver lorsque nous avons une répétition. Pour moi, là présence se nourrit de ces petites choses du quotidien qui se partagent avec ceux qui vivent la pauvreté. »