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À voir en juillet-août

La chronique de Bella Lehmann-Berdugo

La traversée

Varante Soudjan. Fiction. France. 29 juin.

Cinq adolescents dans un bateau, avec leurs éducateurs de quartier, pleins d’espoir. Le capitaine est un ancien flic désabusé. Dans le projet des « Écureuils de L’Ay-les-roses », il s’agit d’apprendre les valeurs de la mer. Mais les uns et les autres ont des préjugés les uns sur les autres. Ça démarre donc avec des cris, des bagarres et un langage très grossier de la part de tous les protagonistes. Seul Ryan, à la recherche de son père marocain, sort un peu du lot. Du côté des « éducs », Alex (qui arbore à chaque plan un nouveau polo pour une grande marque) a bien entendu des vues sur Stéphanie. Entre poncifs et dialogues prévisibles, le récit se nuance en cours de route grâce à quelques scènes réussies, le tout avec les meilleures intentions. Contre toute attente, les jeunes de banlieue ne sont pas forcément de petites frappes ni les flics des brutes. Ils ont aussi du cœur et de l’esprit. Cqfd.

 

Les nuits de Mashhad

Ali Abbasi. Fiction (d’après une histoire vraie). Iran. VOST. Palme d’or de la meilleure actrice à Cannes. 13 juillet .Wild Bunch.

Dans les faubourgs pauvres de Mashhad, ville sainte, une journaliste enquête sur les meurtres de prostituées, la plupart des femmes en situation précaire. Le meurtrier est un bon père de famille qui œuvre au nom d’un l’Islam pur et dur. Un regard sur les femmes, la famille dans la société iranienne avec toutes ses contradictions. La journaliste prend des risques face à l’institution religieuse, à l’appareil d’Etat, à ses collègues. Le déni effarant de la propre famille du meurtrier, de ses proches, apporte une densité supplémentaire à cette histoire. Attention quelques scènes violentes.

Guignol, l’âme populaire de Lyon. Invitation au voyage

Documentaire de Natacha Giler. 14 min. Disponible en replay sur arte.tv/fr/videos/

Il y a 200 ans, Guignol était créé par Laurent Mourguet, ouvrier canut au chômage. Moderne avant l’heure et grâce à de jeunes marionnettistes, Guignol continue de revisiter l’actualité pour dénoncer les injustices sociales. Il a encore de quoi faire.

Crescendo

Dror Zahavi. Allemagne/Israël. Fiction. VOST. 6 juillet.

Eduard Spock, chef d’orchestre célèbre, a accepté de diriger une formation composée de jeunes Palestiniens et Israéliens. Il faut apprendre à jouer non l’un contre l’autre, mais en écoutant l’autre, malgré les peurs, les idées reçues, les rivalités, les conflits de loyauté, les milieux socioculturels différents. Des interprètes très investis, de la grande musique, mais quelques lourdeurs. De la Cisjordanie à l’Autriche, de Pachelbel à Dvorak, de Vivaldi à Ravel, le défi est ambitieux, le film aussi.

Flee

Jonas Poher Rasmussen. Documentaire, animation. Danemark. VOST. 24 août.

Amin a fui l’Afghanistan alors qu’il était enfant. Aujourd’hui, trente ans plus tard, universitaire au Danemark, il raconte son périple à son ami. De Moscou à la Suède, à pied, en container sans air, dans la cale d’un rafiot qui prend l’eau, plusieurs tentatives, des sœurs aussi en fuite… Une scène emblématique : les croisiéristes d’un paquebot photographiant les réfugiés qui coulent. Il y a également les violences d’un exil intérieur : adolescent ne pas pouvoir être soi (il se découvre homosexuel), puis porter l’histoire familiale. Un graphisme soigné, des images d’archives. Le récit intime, dans une forme originale, d’une interminable odyssée vers la liberté.

Leïla et ses frères

Saeed Roustaee. Fiction. Iran. 2h49.VOST. Prix FIPRESCI à Cannes (jury de la Fédération internationale de la presse cinématographique). 24 août.

Dans la famille Joubalou, il y a  Esmail le père de 80 ans -rejeté par ses frères et neveux, la mère personnage secondaire, débordée par la situation, trois fils au chômage, le quatrième, homme de ménage dans des toilettes publiques. Leila l’unique fille, intelligente, entreprenante est employée dans un centre commercial de luxe. Elle convainc ses frères d’y acheter un local pour monter une affaire. Le père lui, voudrait réintégrer sa famille, en devenir le « parrain » en échange de ses pauvres économies lors du prochain mariage. Pris à la gorge par l’inflation galopante et la corruption du pays, tous ne pensent qu’à l’argent, par tous les moyens.

Des rebondissements, un enchaînement infernal de situations, des plans où le réalisateur prend son temps. Des acteurs excellemment dirigés (mention spéciale au patriarche), des scènes très dialoguées, parfois crues. Tout est passé à la moulinette : l’absurdité des traditions, de la religion, le regard des autres, l’hypocrisie (extraordinaire scène de réhabilitation d’Esmail lors d’une fête tape-à-l’œil), la répression des ouvriers, les inégalités sociales et la violence intra familiale. Une famille aux abois, tous logés les uns sur les autres, dans le chaos d’un pays, le bruit et la fureur, avec parfois d’ inattendues bouffées de tendresse. Celles du cinéaste pour ses personnages et pour ses concitoyens.

 

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