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A Tarbes, les conseils citoyens font leurs premiers pas

Quatre conseils citoyens se réunissent chaque mois depuis octobre. Deux tiers des membres sont des habitants des quartiers, les autres, essentiellement des associatifs.

« Cela démarre plutôt bien, se félicite Marlène Margui, directrice de la politique de la ville dans le Grand Tarbes et Lourdes, les premières réunions ont permis de faire connaissance et de définir un fonctionnement. Les conseils étudient maintenant les sujets qu’ils veulent travailler dans les contrats de ville ».
Pour mettre toutes les chances de son côté, Tarbes a procédé par étapes. Un groupe de travail a d’abord été formé avec les parties prenantes – l’Etat, la ville, l’agglo, l’association culturelle Mediane très impliquée dans ces quartiers… Objectif: réfléchir ensemble à la philosophie du projet et à ce que l’on peut en attendre.
Puis à partir de mai 2015, le travail a commencé pour mobiliser les habitants. « Ca été le plus lourd », précise Marlène Margui. Une personne a été recrutée pour faire du porte-à-porte (lire ci-dessous). Connaissant les habitants qui siègent, elle co-anime tous les conseils. « C’est sur la durée que le dispositif devra être jugé », souligne Marlène Margui.

Patricia Sanguinet, médiatrice, co animatrice des conseils citoyens
« Depuis mai 2015, je fais du porte-à-porte dans les quartiers pour informer sur les conseils citoyens. Je prends une tour. Je sonne aux portes, étage par étage. Lorsque la porte en bas est fermée, j’évite de parler de « politique de la ville » à l’interphone. La politique, ça fait fuir. Je dis que j’ai une information à faire passer. Souvent je suis reçue avec du thé, des gâteaux…
C’est dans le quartier Bel Air, le plus en difficultés, que j’ai eu le plus de réponses. C’est pour ces habitants-là que l’enjeu est le plus important. J’ai vu 150 personnes, 40 se sont inscrites au conseil citoyen, 30 gravitent autour en participant par exemple au café des parents.
Chaque conseil a défini ses jours et heures de rencontre, puis priorisé ses thèmes. Il n’y a pas un conseil pareil. Dans celui de Bel Air, tous sont au RSA. Ailleurs, les habitants ont un peu plus de moyens. Les projets varient: améliorer la vie de quartier, s’occuper des jeunes, de l’emploi, organiser des animations…
Ce soir, j’ai un conseil citoyen. Ce matin, j’ai appelé tout le monde pour le rappeler. Je vais passer prendre deux personnes en voiture. On va mettre en place une garde pour enfants pendant les réunions. Ce soir, on a prévu un dîner partagé. Pour que ça marche, il faut que ce soit convivial. »

Sarah Voisin, 43 ans, militante Quart Monde, membre d’un conseil citoyen
« J’ai envie que le quartier bouge. Il faut enlever la mauvaise image. On accuse nos gamins de casser tout même quand ce n’est pas eux. C’est important aussi qu’il y ait un échange, qu’il n’y ait pas chacun pour sa pomme. Dans mon ancien quartier, on s’arrangeait entre voisins. Ici ça manque.
Ce qui compte pour moi, c’est l’intergénérationnel. Les vieux aujourd’hui, on les délaisse. J’ai été femme de ménage pour personnes âgées – je ne peux plus car j’ai un problème d’épaule. Je suis au RSA, je dois me reconvertir. Je connais un papi du quartier qui n’a pas d’enfants. Il m’appelle souvent. Il a un coeur d’artichaut, il a offert un cadeau de Noël à mon fils.
Dans notre quartier, il y a beaucoup de mélanges de cultures. Notre projet, c’est aussi connaître les cultures des autres. On a fait un barbecue cet été avec projection. Les conseils citoyens, j’y crois. Il faut profiter de la chance. Mais il faut nous donner le temps. Que les personnes de la Mairie et du Conseil général nous aident aussi, qu’on ait les moyens quand on a 10 euros alors qu’il en faut 30. »

Véréna Caffin, 48 ans, représentante d’ATD Quart Monde dans un conseil
« On a eu 2 réunions pour mettre en place le conseil citoyen. Et depuis fin septembre, on se réunit une fois par mois. Le quartier est à l’abandon depuis 10-15 ans. Il n’y a pas d’associations, pas de structures. Les logements sont dégradés.
Il y a des personnes pauvres inscrites au conseil mais elles ne viennent pas toujours. Alors je vais à leur rencontre. J’habite à 200 mètres du quartier, juste un parc nous sépare. Comme je promène un animal, je le traverse et je vais parler aux gens.
Je fais remonter leurs demandes. Un monsieur m’a dit qu’il voudrait des cours d’informatique. Les gens souhaitent aussi un lieu de rencontre. La petite épicerie va fermer. On lance l’idée, ça se fera dans un an, dans deux ans…
Les personnes les plus pauvres ont encore peur de venir. Je sais ce que c’est. Si on m’avait dit que je parlerais devant 100 personnes, je me serais cassée à toute vitesse. Aujourd’hui j’ose et j’en suis fière.
Le conseil citoyen, ce n’est pas une participation bidon. Nous – moi aussi je suis quelqu’un au RSA -, on a toujours peur qu’on se fasse avoir. Là, on est entendu. Ca fait plaisir que ce qu’on dit soit respecté. »

Véronique Soulé

Photo : Patricia Sanguinet lors d’une réunion de préparation des conseils citoyens à Tarbes (A.Benesty, Mediane)