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Paroles de militant Quart Monde – Maurice Dubois : « Quand vous parlez, cela encourage d’autres »

Lors de la Journée mondiale du refus de la misère le 17 octobre, Maurice Dubois, militant ATD Quart Monde du Val d’Oise, s’est exprimé au nom des participants de l’Université populaire Quart Monde d’Île-de-France.« Aujourd’hui, il y a beaucoup de personnes qui ont la vie difficile et j’ai peur qu’il y en ait beaucoup plus qui auront la vie difficile demain. On ne sait pas où l’on va. La vie difficile, c’est quand vous n’avez pas de logement. Il y a des gens qui sont ainsi sans logement pendant des années.

Quand on est sans logement avec des enfants, on nous propose de nous payer un hôtel en attendant. Mais pour un gamin, la vie à l’hôtel, c’est difficile. Il est enfermé dans une chambre. Il ne peut rien faire. À l’école, il cache qu’il habite à l’hôtel. Alors on nous propose de le placer à l’Aide Sociale à l’Enfance. Pour nous, être sans logement, c’est la galère, mais être sans nos enfants, c’est encore pire. On accentue la misère finalement. Pour ceux qui nous aident, un placement, c’est normal, c’est une solution. Ils ne voient pas les choses comme nous. Pour l’enfant qui sera placé, il aura tout matériellement mais il aura un manque affectif. Il va se sentir seul, sans ses parents, sans ses frères et sœurs. Il va se poser des questions. Pour lui aussi, on accentue la misère finalement. Il y a des enfants, quand ils ont 15, 16 ans, ils ne supportent plus les foyers, ils fuguent, se retrouvent à la rue. C’est dramatique. Il y a des mairies qui chassent les pauvres de leur commune. On envoie les policiers pour chasser les personnes qui dorment devant la gare. On envoie les engins de travaux publics pour chasser les voyageurs ou les Roms. On démolit des logements, mais on ne construit pas de logements avec un loyer à prix réduit. Quand vous êtes dans les difficultés, on vous fait beaucoup de reproches, on vous traite de tous les noms. À force, ça peut rendre méchant. Quand on a vécu cela, on ne peut pas se taire. Il faut le dire. Personne ne peut le dire à notre place. À l’Université populaire Quart Monde, on ose prendre la parole. Au début ce n’est pas facile, mais quand vous parlez, cela encourage d’autres dans leur combat. Vous savez que ce que vous avez à dire est important, alors vous ne pouvez pas vous taire. Vous vous lancez. Dire la violence de la misère, c’est le début du changement. L’Université populaire est un endroit où on est écouté. Ceux qui écoutent, ils com­prennent et après ils font comprendre à d’autres. Si certains arrivent à comprendre, alors, un jour, tout le monde comprendra le fond des choses. Il y aura plus de gens derrière ceux qui sont dans les difficultés. Il y aura plus de solidarité.