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Pascal Percq : « Renouveler la démocratie… oui, mais avec tous ! »

Pascal Percq, allié d’Atd Quart Monde, a observé la participation citoyenne en tant que journaliste en Europe et en Amérique Latine (voir les livres Les habitants aménageurs, Éd. de l’Aube, et Les caméras des favelas, Éd. de l’Atelier), puis comme acteur, en tant que Directeur de la Démocratie participative et de la citoyenneté aux côtés de Martine Aubry, maire de Lille.
Il mesure les avancées positives, mais aussi le long chemin qu’il reste à parcourir.

Qu’est-ce qui ne marche pas dans notre fonctionnement démocratique ?

La coupure entre élus et habitants est profonde. Le fonctionnement institutionnel éloigne les décideurs des personnes concernées. C’est un paradoxe : d’un côté, on constate une perte de confiance dans les élus, dans la démocratie représentative, et, en même temps, nombreux sont ceux qui souhaitent participer à  l’élaboration des décisions qui les concernent. Une explication: le monde est devenu complexe. Sur bien des questions essentielles, l’environnement, l’économie, l’avenir des enfants, beaucoup pensent que les politiques ne peuvent rien.

Quelles formes peut prendre la « démocratie participative » ?

Dans les années 1980, des élus ont décidé de retourner voir leurs concitoyens. Mais il a fallu attendre la loi Vaillant en 2002 pour que les conseils de quartier deviennent obligatoires dans les grandes villes… sans préciser ni leur mode de désignation ni leurs compétences. Il y a de grandes différences d’une ville à l’autre, mais un même constat : la représentation inégalitaire des populations. On y voit peu de jeunes, peu de personnes pauvres, pas d’étrangers.
Ces lieux de démocratie peuvent même être détournés à des fins anti-sociales : pour s’opposer à la création de logements sociaux, de terrains pour gens du voyage, voire même contre un espace de jeux pour enfants. À l’inverse, des citoyens peuvent aussi proposer aux élus la mise en oeuvre de la loi DALO pour mieux prendre en compte les familles pauvres. La participation citoyenne de tous devrait être le premier objectif d’une démocratie renouvelée, or on constate qu’elle renforce finalement l’exclusion.
À côté de cela, il y a d’autres initiatives, plus citoyennes : groupes de voisins solidaires, des comités citoyens, d’associations. La démocratie participative doit s’appuyer et renforcer de telles dynamiques. Et parmi celles-ci, je place à un haut niveau les Universités populaires d’Atd Quart Monde.

Que faut-il pour que la démocratie participative soit davantage ouverte à tous ?

D’abord reconnaître qu’il existe un savoir chez les pauvres. Admettre qu’un fonctionnement ne peut être démocratique s’il laisse de côté 20 à 30 % des personnes dans un quartier. C’est un des thèmes de réflexion du réseau Wresinski « Vie locale citoyenne ». Il faut aussi accepter le fait que l’interlocuteur a le droit de ne pas être de votre avis. C’est le débat qui nourrit la démocratie.

Propos recueillis par Jean-Christophe Sarrot