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Plus d’Europe, oui, mais de quelle Europe ?

Extraits de l’intervention d’Eugen Brand, Délégué général du Mouvement international ATD Quart Monde, en clôture de l’Université populaire Quart Monde européenne du 5 mars 2012.« Nous vivons une crise bien plus profonde qu’une crise financière : une crise de la connaissance. Car nous ne sommes pas en mesure de dire quelles sont, aujourd’hui en Europe, les conséquences dans la vie de millions de personnes des crises économiques et financières et des politiques que l’on met en place. C’est pourquoi nous demandons à la Commission d’élaborer un rapport sur ces questions, rapport qui ne serait pas réalisé par les seuls experts, mais basé sur un véritable croisement des savoirs avec les intelligences de tous.

Quelles « règles d’or » ?

Le 30 janvier 2012, des gouvernements de l’Union Européenne ont adopté, ici à Bruxelles, un nouveau pacte budgétaire, des « règles d’or » à appliquer par chaque État, afin de pouvoir mieux mesurer et piloter l’équilibre budgétaire de chaque pays.

Quelles seraient les « règles d’or » d’une citoyenneté solidaire en Europe ? Nous aimerions interpeller le CESE : pourrait-il, à l’aube de 2013, Année européenne de la citoyenneté, travailler à un avis qui dise précisément ce qu’est une citoyenneté des Droits de l’Homme et du refus de la misère ? Comment mesurer la croissance d’une citoyenneté qui agit pour l’accès aux droits fondamentaux pour tous, la participation de tous, le vivre ensemble avec nos différences et pour une véritable représentation des personnes vivant dans la pauvreté ?

Charte sociale

Parmi les cinq objectifs clefs de la Stratégie « Europe 2020 » de l’Union Européenne, il y a celui de réduire de 20 millions le nombre de personnes menacées par la pauvreté. Mais qu’advient-il des autres 60 millions ? L’Intergroupe parlementaire « Pauvreté et Droits de l’Homme » (1) est très engagé au sein du Parlement européen. Nous souhaitons que ce dernier se mobilise pour éviter une Europe des Droits de l’Homme à deux vitesses, une Europe qui, pour faire face à la crise économique et financière, sacrifie les plus faibles. Pour cela, garantir les droits est indispensable. Dans ce sens, l’Union Européenne et tous les États d’Europe devraient ratifier la Charte sociale européenne (2) et ses articles 30 et 31.

Se former et dialoguer

Une croissance intelligente ne peut pas être d’abord économique. Elle exige la construction d’une gouvernance capable de fédérer toutes les intelligences. C’est pourquoi les institutions européennes doivent soutenir une formation civique et professionnelle susceptible de créer un dialogue entre les citoyens les plus défavorisés et les décideurs, comme le fait le CESE en accueillant régulièrement l’Université Populaire européenne du Quart Monde depuis 1989.

L’Europe et les OMD

L’actualité est aussi, au niveau des Nations Unies, celle de l’évaluation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) (3) : que va-t-il se passer au-delà de 2015 ? Le Mouvement ATD Quart Monde demande d’une manière solennelle à la communauté internationale de ne pas présenter de propositions trop rapidement, mais de réfléchir avec celles et ceux qui se trouvent mis en dehors des travaux l’évaluation des OMD.

C’est à cette politique-là que les personnes en grande pauvreté veulent prendre part. C’est au niveau de cette politique que l’Union Européenne pourrait prendre un leadership mondial en refusant l’écrémage des pauvres. C’est à ce niveau que le rayonnement et la légitimité de l’Europe se joueront, bien plus que sur un plan financier. Car c’est là que les plus pauvres du monde entier l’attendent. C’est avec une telle politique que l’Union européenne poursuivra le projet de ses fondateurs : un projet de paix entre les personnes et entre les peuples. »

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Les chiffres de la pauvreté en Europe

80 millions d’Européens vivaient sous le seuil de pauvreté en 2009, soit 16% de la population (source Centre européen de recherche en politique sociale). Les enfants sont plus touchés que le reste de la population. La stratégie « Europe 2020 » (voir article ci-contre) a estimé qu’au total 116 millions de personnes (soit 23%) étaient menacées de pauvreté ou d’exclusion sociale en 2010 dans l’Union Européenne (sous le seuil de pauvreté, ou en situation de privation matérielle grave, ou sans emploi suffisamment stable. Source Eurostat).

En 2010, le taux de chômage des 15-24 ans est de 20,9% en Europe, contre 8,4 pour les 25-64 ans (41,6% en Espagne – 15% en 2007 -, 32,9% en Grèce, 27,5% en Irlande, 22,9% en France, 19,6% au Royaume-Uni et 9,9% en Allemagne). Les pays les plus touchés ont connu des émeutes ou des mouvements d’Indignés en 2011. Le nombre de suicides de jeunes est reparti à la hausse dans les principaux pays européens depuis 2007 (source Eurostat).

17,8% des Européens vivaient dans des logements surpeuplés en 2009. La construction de logements est en baisse dans toute l’Europe. Il se pourrait que d’ici deux à trois ans, il y ait une grave pénurie. En 2009, une famille de 3 personnes proche du seuil de pauvreté dépense 42% de ses ressources pour se loger, contre 22% pour une famille de 3 personnes aux revenus moyens (source CECODHAS Housing Europe, octobre 2011).

Télécharger le compte rendu de L’Université Populaire : UniversitePopulaireEuropeenne-5mars2012