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Pauvreté, RSA, logement social, fraudes… Luttons contre les idées reçues

Feuille de route invite ses lecteurs à déconstruire des préjugés et des stéréotypes répandus sur la pauvreté et les pauvres, afin que ceux-ci cessent d’être les boucs émissaires des maux de nos sociétés et qu’ils deviennent au contraire des partenaires à part entière dans la construction d’un monde plus juste. Voici quelques-unes de ces idées reçues. Diffusez-les autour de vous, réagissez, participez au débat.

« La France distribue des minima sociaux élevés. »

Faux. La France est dans la moyenne européenne. En France, le montant des minima sociaux pour une famille de deux enfants s’élève à 72% du seuil de pauvreté, alors qu’il est en moyenne de 76% dans l’Union Européenne (source OCDE, cité dans la revue Études et résultats du ministère de l’Emploi, février 2006).

Par ailleurs, le montant des minima sociaux progresse moins d’année en année que l’ensemble des revenus. En 1988, le RMI – Revenu Minimum d’Insertion – équivalait à 50% du SMIC. En 2012, le RSA – Revenu de Solidarité Active – socle est à 42% (soit 474,93 € pour une personne seule).

« Il n’y a pas d’argent dans les caisses pour augmenter les minima sociaux »

Faux. D’une part, la moitié seulement des 7,5 milliards € prévus pour le RSA est effectivement dépensée, à cause des non-recours (source Odenore). D’autre part, il est nécessaire de prendre des mesures de plus grande justice fiscale afin d’augmenter les recettes de l’État et des collectivités territoriales, et d’accroître ainsi les moyens de la solidarité nationale.

« Les gens font tout pour toucher le maximum d’aides »

Faux. Les « non-recours » aux droits et prestations sociales sont au contraire très importants. La moitié des personnes éligibles au RSA n’en fait pas la demande (source Odenore, voir ci-dessus). Par ailleurs, 1,5 million de personnes sur les 6 millions de bénéficiaires potentiels ne disposaient pas de la CMU (Couverture Maladie Universelle) en 2008. Une étude du Fonds CMU estimait en 2010 que le non-recours à la CMU-C (Couverture Maladie Universelle Complémentaire) était de plus de 20%. Pour l’Aide à l’Acquisition d’une Complémentaire Santé (ACS), le taux de non-recours est de 80%. Les raisons de ces non-recours : la volonté de ne pas dépendre de l’aide publique, la complexité des démarches, le souhait de ne pas être contrôlé, le manque d’information…

« Le pouvoir d’achat moyen des Français a augmenté entre 2007 et 2010 »

Vrai et faux. Le pouvoir d’achat global au niveau de la France a légèrement augmenté. Mais, compte tenu de l’augmentation de la population, le « pouvoir d’achat du revenu arbitrable » (une fois que les dépenses obligées – loyer, assurance, électricité… – ont été payées) par personne a baissé en moyenne de 0,1% entre 2008 et 2010 (source INSEE)

La situation est plus grave pour les revenus les plus modestes. Par exemple, de 1992 à 2006, les dépenses incompressibles sont passées de 52 à 74% de leur budget. Selon le Secours catholique (Message, février 2011) : « se chauffer devient un luxe pour des millions de personnes » ; 3,4 millions de personnes subissent la précarité énergétique. Le prix du gaz a augmenté de 50% environ depuis 2004.

« Les pauvres ne veulent pas travailler. »

Faux. Les études convergent : 64% des chômeurs interrogés dans huit pays européens déclarent qu’ils veulent retrouver un emploi, même si cela ne leur procure pas un gain financier, alors que seuls 48% des personnes déjà en emploi déclarent vouloir conserver leur travail dans une telle situation (source : étude coordonnée par Duncan Gallie en 1999, citée par Jean Gadrey)

L’enquête « L’influence des incitations financières sur le retour à l’emploi des bénéficiaires de minima sociaux » menée en 2009 par la Direction Générale du Trésor montre bien que la valeur accordée au travail et la volonté d’assurer le meilleur avenir possible conduisent la plupart des bénéficiaires à accepter la reprise d’un emploi, même sans gain financier immédiat. Les principaux freins évoqués pour la reprise d’un travail sont le manque d’emplois, de moyens de transport, de formations adaptées, etc.

« On construit assez de logements sociaux. »

Faux. La construction a progressé régulièrement jusqu’en 2007 mais s’est effondrée depuis : seulement 333 000 logements commencés en 2009 contre 435 000 en 2007. On estime que le niveau de déficit va atteindre le million de logements. De plus, c’est surtout le nombre de logements sociaux accessibles aux revenus moyens qui progresse – multiplié par 10 entre 2000 et 2010 – et non le nombre de logements accessibles aux plus bas revenus – multiplié par 2 sur la même période – (rapport Mal logement 2011 de la Fondation Abbé Pierre).

« Les pauvres sont des fraudeurs. »

Faux. La fraude aux prestations sociales est évaluée à environ 3 Milliards € et concernerait 1% des particuliers (source Cour des comptes). 90% de ces 3 Milliards sont récupérés par la CNAF. La CNAF estime le taux de fraude à 0,46 % pour les prestations familiales, 3,1% pour l’API (Allocation Parent Isolé), 3,6% pour le RMI-RSA (source : AFP, 29 avril 2010).

À comparer avec :
– la fraude aux prélèvements sociaux, estimée à entre 8 et 12 Milliards € et qui concernerait 10% des entreprises (source Conseil des prélèvements obligatoires en 2007),
– la fraude fiscale en France : entre 20 et 25 Milliards € (pour le Conseil des prélèvements obligatoires en 2007), 30 Milliards € (pour la Direction du Budget), 50 Milliards € (pour la Commission Européenne.

Pour accéder à toutes les idées reçues sur les pauvres et la pauvreté.