
Démolition-reconstruction à Noisy-le-Grand : « Il faut peindre, parce que c’est moche sinon »
Fin 2010, une habitante de la cité du Château de France s’est mise à peindre devant son pavillon, attirant la curiosité des voisins. Depuis, cela a fait tache d’huile. Aujourd’hui, des couleurs éclatent sur les façades du quartier. Des enfants sont d’abord venus peindre dans l’atelier que Jacqueline Page avait installé chez elle. Puis des parents lui ont demandé des portraits pour décorer leurs appartements. Enfin, l’idée est venue de peindre des fresques sur les façades murées des pavillons alentour. « Il faut peindre, parce que c’est moche sinon », disent les enfants.
Les bâtiments construits ici en 1970 sont l’objet d’un projet de démolition-reconstruction qui prend du retard. 13 pavillons sont murés, 23 sont encore habités par des familles qui devraient bientôt déménager et une dizaine par des membres d’ATD Quart Monde. À terme, tous seront détruits, ainsi que l’immeuble de 32 appartements situé au milieu. Quatre immeubles seront reconstruits pour abriter 48 logements gérés par Emmaüs-Habitat, 30 logements du centre de promotion familiale géré par ATD Quart Monde et, en plus, des logements locatifs privés ou en accession à la propriété.
Tant que des familles habitent encore des pavillons, des membres d’ATD Quart Monde et des citoyens engagés tels Jacqueline continuent de vivre ici, en accord avec le bailleur Emmaüs-Habitat(1). Ainsi, le quartier n’est pas laissé à l’abandon. Au contraire, il renaît avec ces fresques qui ornent aujourd’hui une vingtaine de façades. Le désert avec les chameaux, la plage pour les amoureux, le match de catch, la princesse et son château, l’« immeuble à poissons », etc. : chaque fresque a son histoire et sa ou ses signatures : Melvina, Lanna, Léa, Cindy, Carla, Éva, Fiona, Alexis, Ciréné, Mohammed, Gwenaelle… Un peu plus loin, un jardin japonais et des potagers ont été aménagés par des habitants.
Cet art partagé a révélé des talents cachés chez les enfants et les parents. Une maman a décoré son couloir d’une fresque de roses. Un papa a lui aussi installé dans son pavillon un petit atelier pour peindre.
Les murs pourront tomber et les peintures redevenir des poussières de couleur, mais les traces laissées au coeur de chaque habitant, elles, ne disparaîtront pas.
JCS
À voir : le reportage TV de la chaîne LCI.
À lire sur les démolitions-reconstructions : l’étude « Opérations de démolition et reconstruction des cités HLM en France » et le rapport de la Cour des comptes « La Politique de la ville, une décennie de réformes »