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« Il faudrait que d’autres parents vivent la même chose que moi »

Vône Lancelot habite à Rennes et a quatre enfants. Elle a participé entre 2007 et 2011 à l’action pilote d’ATD Quart Monde « En associant leurs parents à l’école, tous les enfants peuvent réussir ! » Elle témoigne de son parcours avec l’école et de celui de ses enfants.

« J’ai mal vécu mon primaire et donc je me suis dit que mes enfants n’allaient rien apprendre non plus à l’école. Quand ils étaient en CM1, une maîtresse m’a demandé gentiment au portail de la cour : « Comment se fait-il qu’on ne vous voit pas ? »

« Il travaille bien ! »

Au fil des semaines, je suis allée petit à petit vers elle. Elle ne m’a pas parlé de ce que j’ai mal fait. Elle m’a parlé de mon enfant : « J’ai eu votre fils, il travaille bien ! » Petit à petit, je voyais qu’elle s’intéressait à mon fils et que, quand mes enfants revenaient à la maison, ils apportaient tout ce qu’ils avaient fait en classe. J’ai réappris en même temps qu’eux, en fait. Je me disais qu’il fallait que j’avance pour eux et avec eux.

« Je ne suis pas toute seule »

Cela a pris beaucoup de mois. À chaque fois que j’allais déposer mes enfants, j’avais un peu plus de plaisir à y aller. J’ai l’impression qu’avant, personne ne me voyait. Alors, quand quelqu’un a su poser son regard sur moi et me parler, je me suis dit : « C’est bon, je ne suis pas toute seule. »

Si je suis ce que je suis devenue, c’est parce qu’il y a eu des êtres humains qui ont fait en sorte que je n’aie plus honte de moi.

Chacun avance à sa façon

Il faudrait que d’autres parents vivent la même chose que moi. Certains parents qui vivent ici ne vont pas de l’avant. Si on ne va pas les chercher chez eux, leur relation à l’école ne changera pas.
J’ai aujourd’hui des armes pour pouvoir avancer. Mes armes, c’est surtout de ne pas montrer du doigt le parent qui vit la même chose que ce que j’ai vécu, c’est d’installer une relation de confiance dans un lieu comme un « espace parent » à l’école, ou ailleurs aussi.

Complémentaires

Un professeur s’est impliqué dès le début du projet (il s’agit de l’action pilote « En associant leurs parents à l’école, tous les enfants peuvent réussir ! »). Cela a nettement amélioré la relation parents-enseignants, parce qu’on avait tous comme intérêt de faire avancer l’organisation de l’école. On est devenu – c’est un bien grand mot – complémentaires. Il posait des questions comme : « Quelles activités pourraient être intéressantes pour une kermesse ? ». Donner son avis sur telle ou telle animation peut paraître très banal, mais c’est un début de communication entre parents et enseignants. C’est autre chose que de ne parler que de son propre enfant. Une autre enseignante avait proposé de rendre plus conviviales les réunions avec les parents.

Ma fille a changé

L’enseignant de ma fille m’a dit que lorsque j’ai eu un rôle pour faire vivre l’école, ma fille s’est sentie plus autonome et a pris des initiatives.
Chacun a la volonté que l’on avance ensemble. Pas forcément tous au même rythme, parce qu’on est tous différents, mais que chacun avance comme il est. Mon patrimoine personnel vient d’un passé qui n’est pas bon. Mais c’est cela qui fait que maintenant je me bats pour que ce soit meilleur. »

« Chacun avance à sa façon. Maintenant, je vais à l’école, mais il y a d’autres parents qui aimeraient franchir ce pas et ne sont pas arrivés encore à ce stade. Pourtant, avec son expérience, chacun peut apporter une sacrée richesse à l’école. » (Vône Lancelot)